Surprise dans la collaboration1
Propos recueillis par Marie Christine Fave
Servir : Vous avez rencontré des soucis dans la collaboration. Que s’est-il passé ?
L’infirmier était dans le mensonge. Les difficultés ont abouti à une rupture complète dans la relation. Les locaux lui appartenaient. Il a tout fait pour nous mettre dehors, nous bloquer dans l’activité. Il jouait à la fois sur sa double casquette de bailleur et d’associé. Il a fallu d’urgence trouver d’autres locaux.
Servir : Quelles ont été les réactions de tes collègues ?
De la colère et de la haine, avec des injures régulières. Leur désir de vengeance est allé loin dans les propos. Ils ont aussi passé des nuits blanches.
Servir : Et la tienne ?
De la colère aussi face à la situation avec un sentiment d’injustice et d’être trompé. Je remettais cela à Dieu de manière régulière. Mon coeur s’apaisait par rapport à la personne même si l’injustice persistait.
Par rapport à mes collègues, je les comprenais à vues humaines. J’essayais de trouver des solutions et d’intervenir verbalement pour tenter de les apaiser. À un moment, ils ont mal interprété ma démarche : ils ont pensé que je jouais un double jeu. On a eu une conversation claire. J’ai expliqué mon refus d’entrer dans le jeu de la médisance et de la vengeance, même si j’avais aussi de la colère. Ils ont vu un chrétien à l’oeuvre.
Servir : Aujourd’hui, êtes-vous « à la rue » ? En procès ?
On a gagné tous les procès (administratif, ordre des médecins…). Cependant, cela a duré environ 3 ans et c’était long. J’ai expérimenté la souveraineté de Dieu dans les résultats des procès entamés par l’infirmier. Je faisais confiance à la justice de Dieu. Il a promis que la justice serait faite.
Aujourd’hui, je continue à exercer avec mes collègues médecins dans un nouveau local.
Servir : Un « happy end » pour vous au niveau pratique. Mais cette histoire est-elle finie dans ton coeur ou en reste-t-il encore quelque chose ?
Dès le début, j’avais remis cette situation entre les mains du Seigneur. Ainsi, cela n’a pas été usant. Par ailleurs, je suis rentré très tôt dans une démarche de pardon devant Dieu : je ne voulais pas être prisonnier d’un non-pardon dans ma vie.
Servir : Le Seigneur nous demande d’aimer nos ennemis. Comment appliques-tu cela dans ce vécu professionnel ?
Aimer ses ennemis, ce n’est pas sentimental. Aimer un ennemi, c’est pouvoir lui annoncer le salut.
J’ai depuis longtemps le projet d’écrire un courrier à cet infirmier, de lui dire que je n’ai pas de rancune contre lui. Je n’ai pas encore fait cette démarche, car les procès viennent juste de se terminer, et cela pourrait être mal interprété à ce stade : j’attends le moment opportun où cela sera sage.
NOTES
1. Interview de J. qui exerçait à mi-temps dans un cabinet médical avec trois autres médecins et un infirmier.