Traversée du désert… Un défi, une opportunité ?
Par Agnès Baroncini
Découragement – Dieu, où es-tu ?
Échec – Qu’ai-je fait de mal dans ma vie ?
Solitude – pourquoi m’abandonnes-tu ?
Épreuve incompréhensible – Pourquoi ?
Retrait – L’heure a-t-elle sonné ?
Tentation de fuir loin de Dieu !
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Désert ! Un mot évocateur de souffrance, d’épreuve, de solitude. Rien de bon ne peut en sortir à vues humaines ! Et pourtant, si dans les apparences il est synonyme d’aridité et d’absence de vie, j’ai pu expérimenter son côté salvateur tant sur le plan physique qu’émotionnel et spirituel.
En 2000, alors que je vivais le moment le plus important de ma vie : ma rencontre avec Jésus-Christ, je ne pouvais imaginer un seul instant que ce premier face à face intense allait se répéter quelques années plus tard !
2008 ! Une nouvelle année qui devait s’annoncer identique à celle qui venait de s’écouler. Mais « La vie est un long fleuve tranquille » n’était pas de mise. Le 18 janvier à 17 h, un coup de fil allait tout faire basculer. Annonce à la fois brutale et impersonnelle d’un cancer qui en plus d’être atypique est rare, très rare : 20 cas dans le monde.
Cet appel téléphonique fait encore écho en moi lorsque je regarde en arrière. Prise de conscience que bien souvent ma vie se déroulait devant la porte du désert avec ses lots de joie, de peine, de difficultés de toutes sortes ! Mais il y a eu ce temps tout particulier où j’ai été propulsée dans ce désert que je redoutais tant ! Non pour y rester, non pour m’y installer, mais pour le traverser ! La porte était franchie ! Nous n’y entrons pas de nous-mêmes ! N’est-ce pas folie que de vouloir y séjourner rien que pour le plaisir ? N’est-ce pas une terre inconnue pour nous occidentaux qui avons l’habitude d’une vie pleine de confort ? Si encore j’étais née dans le désert et que j’avais appris à vivre comme ces nomades au coeur des terres arides et inhospitalières, pourquoi pas ! Mais là, ce n’est qu’appréhensions, doutes, peurs et angoisses surtout lorsque c’est la première fois !
Cancer, le mot clé qui a fait actionner la serrure de cette porte si bien fermée auparavant ! L’annonce de la maladie a été le point de départ de plusieurs pertes en plus de la santé : professionnelle, financière, amicale et sociale. Et c’est cette multiplicité de pertes qui m’a fait vivre le désert absolu sous « toutes ces formes » !
L’étape du premier choc passée, qu’allais-je faire dans ce désert ? Le subir ? Le haïr ? Ou y avait-il quelque chose à comprendre, à vivre alors que tout démontrait le contraire ? Fallait-il l’apprivoiser ? Le désert, un lieu de vie ! Paradoxe, n’est-ce pas ? Fragilisée par la maladie, jeune encore dans ma foi, inexpérimentée face à cette épreuve, je suis passée par un temps de questionnement, voire un peu de « révolte ». Je pourrais traduire cette période par l’acrostiche du mot DÉSERT page ci-contre ! J’avais le souci d’être honnête avec mes sentiments, mes émotions et je pensais qu’il était tout à fait normal d’avoir de telles interrogations. Mais ce fut bref, car très vite je compris que cela n’était pas en adéquation avec « Qui » j’étais au fond de moi. Dieu me montrait autre chose ! J’avais des combats à mener et ils étaient devant moi ! Je savais que ce n’était pas en m’enfonçant dans le découragement au risque de m’éloigner toujours un peu plus de Dieu que j’allais m’en sortir ! Entre la réalité de la maladie qu’il fallait affronter et les chimiothérapies qui allaient être particulièrement rudes, comment faire pour vivre ce « désert » et en saisir toutes les subtilités et les opportunités qui allaient se présenter jour après jour ? Il fallait que je m’entoure de mes compagnons de route favoris accessibles à tout moment de la journée. Je veux parler bien sûr de l’Esprit Saint, de la prière et de la Parole toujours à portée de main.
Alors que les traitements m’affaiblissaient toujours un peu plus tant ils étaient violents, et que je vivais ce combat seule avec moi-même, une relation toute particulière s’installait entre Dieu et moi. Une communion qui, au fil du temps, non seulement s’intensifiait, mais devenait un incontournable dans mon quotidien. La solitude de départ a fait place, petit à petit à des rendez-vous avec Dieu que je n’aurais manqués pour rien au monde ! Personne très active dans le cadre de ma profession et de ma vie d’Église, je découvrais un aspect tout à fait nouveau pour moi : j’étais – et je suis toujours – une personne importante aux yeux de Dieu ! Être ! Voilà le projet que Dieu avait pour moi ! Peu importe mes actions, mes projets, mes ambitions ! Je me trouvais donc en formation à l’école de Dieu. Tout premier niveau ! Cours préparatoire (CP) – lieu : le Désert ! Tout un programme, croyez-moi ! « Être » implique de se confronter à soi, de réaliser et d’accepter ce que nous sommes avec nos imperfections, nos faiblesses, nos manquements, mais aussi nos forces et nos atouts ! Impossible d’y échapper ! Et plus en position allongée que debout à chaque retour de chimiothérapie, j’ai appris à ÊTRE, me laissant façonner par les mains douces et fermes à la fois, de Dieu, notre potier par excellence !
Jamais je n’aurais pu faire ce pas de géant dans mon parcours spirituel si j’avais continué à mener ma vie d’auparavant !
Direction – Merci Seigneur de me montrer le chemin !
Écoute – Esprit Saint, qu’il est doux ton murmure !
Sanctification – La voie par excellence !
Espérance – Avec toi, le meilleur !
Rencontre inoubliable – Que de beaux moments passés en tête à tête !
Témoignage – Là où tu veux que je sois ! À toi la gloire ! |
A découlé de cet « arrêt forcé » une vue renouvelée non seulement sur moi, sur les autres, sur mes projets et mes ambitions futures, mais également sur Dieu.
L’année 2008, une retraite dans le désert, un rendez-vous spirituel ! Une occasion unique de revisiter les moindres recoins de mon être intérieur pour y faire le « ménage de printemps ». Temps privilégié, déroutant au début, mais qui permet à l’âme de dire « stop » aux différents combats qu’elle mène, sans le savoir parfois tant le quotidien est chronophage, et qui s’autorise enfin à poser les armes ! Le désert, un lieu du « tout est possible » où colère, angoisses, peurs peuvent s’exprimer sans retenue envers Celui qui sait tout de nous ! Pour ensuite se laisser « réparer », « restaurer » et « préparer » pour une nouvelle destinée.
Si la porte d’entrée a été la maladie, la sortie a été concrétisée par l’écriture de mon livre « Mon cancer, entre combats et découvertes ». Renouvelée dans mes forces par cette traversée qui fut rythmée par les soins et les temps de présence avec Dieu, je compris aussi qu’il y aurait un AVANT et un APRÈS ! Plus possible de repartir sur le même mode de vie, non seulement pour ménager ma santé, mais aussi et surtout parce que Dieu avait un autre projet de vie avec lui. Je suis émerveillée, encore aujourd’hui, de voir comment Dieu a tout dirigé. Une nouvelle orientation professionnelle acceptée par mon supérieur, une nouvelle habitation non seulement plus adaptée à mes soucis de santé, mais avec en prime un confort de vie bien meilleur. Et enfin et surtout, pouvoir me consacrer au ministère que Dieu avait préparé pendant toute cette traversée : ministère de la Parole, ministère de relation d’aide biblique, écriture d’un nouveau livre en cours ! Nouveau départ , nouvel acrostiche ci-dessus que je vous laisse méditer !