Est-il bien nécessaire de se former ?
Par Eric Waechter
Quelle place pour la formation au sein de l’Église locale ?
Nos Églises accordent une place importante au sacerdoce universel : tout croyant est appelé à servir Dieu, et cela, dans l’Église, tant dans sa dimension universelle que locale, selon les dons que le Seigneur lui a accordés.
Quelle place la formation occupe-t-elle dans la mise en oeuvre de ce modèle biblique ? Est-il nécessaire de se former pour acquérir des compétences afin de bien servir dans son Église ? Faut-il prendre en compte le critère de la compétence, donc de la formation, si l’on veut nommer un ancien, un diacre, ou une quelconque personne qui devra assurer un service dans l’Église ? La formation, et la formation théologique en particulier, sont-elles exclusivement réservées à ceux qui envisagent un ministère à plein temps ? Ou cela concerne-t-il également les anciens ou les diacres ?
Le constat : la réponse n’est pas uniforme au sein même des Églises qui composent notre Union. Sans entrer dans un état des lieux exhaustif, disons simplement que la réponse d’une Église locale dépendra beaucoup du positionnement personnel de chaque ancien. En clair, si un ancien (à plein temps ou non) a été au bénéfice d’un parcours de formation théologique, il encouragera au moins toute initiative de formation pour qui veut servir dans son Église locale.
Faut-il vraiment se former ?
Il existe encore des réticences à l’égard de la formation théologique. Il y a une forme de spiritualité qui donne la priorité à la piété (ce qui compte, c’est ce que je vis avec le Seigneur, on a toujours fait « comme ça »…) et qui y oppose systématiquement tout effort de la raison pour embrasser des contenus théologiques (l’aide du Saint-Esprit est suffisante pour lire et étudier la Parole de Dieu, la théologie divise, etc.). L’expérience montre que ces postures produisent très souvent, dans la durée, des Églises qui se vident parce que l’enseignement s’appauvrit lorsqu’il n’a pas dévié vers l’hérésie. À l’inverse, un enseignement solide, réfléchi et construit, participe à la croissance de l’Église. Généralement, ces Églises bénéficient du ministère de personnes solidement formées sur le plan théologique.
L’Écriture nous dit peu de choses de la vie de l’apôtre Paul avant sa rencontre avec le Christ ressuscité, mais elle en dit suffisamment pour comprendre qu’il a suivi une longue formation théologique (acquisition de connaissances et de compétences) auprès d’un des plus grands maîtres de l’époque, Gamaliel, et qu’il était plutôt jeune pour fréquenter ces milieux. La lecture de ses épîtres nous convainc facilement de son esprit brillant ; Paul est intellectuellement très puissant (capacité particulière, don) ! Ce qui ne l’a pas dispensé d’une formation théologique, bien au contraire !
Un bon menuisier est celui qui, naturellement doué de ses mains, a fréquenté les meilleurs maîtres-artisans de sa profession. Les meilleurs théologiens, enseignants ou prédicateurs sont ceux qui, naturellement doués pour ces disciplines, ont fréquenté de près les grands spécialistes du texte biblique. C’est un principe incontournable qui en appelle un autre : un responsable d’Église ne peut pas accompagner un fidèle dans sa croissance spirituelle au-delà du point où il est lui-même arrivé. Se former, c’est déjà se donner les moyens de progresser soi-même dans la sanctification pour ensuite, pouvoir accompagner d’autres dans leur cheminement spirituel.
Ce que nous venons de dire pour la formation théologique vaut pour tous les ministères nécessaires au bon fonctionnement et à l’édification de l’Église. Lorsqu’une capacité particulière est discernée chez une personne, il devrait y avoir une obligation de formation pour acquérir de nouvelles connaissances et compétences, et ce faisant faire fructifier ce que Dieu a donné pour l’édification de son Église.
Les bienfaits de la formation
Il m’est arrivé d’observer à plusieurs reprises les bienfaits qu’opérait un parcours de formation. Entreprendre une formation qui oblige à un contact régulier et prolongé avec la Parole de Dieu crée un contexte favorable pour permettre au Saint-Esprit de travailler dans la vie du croyant. Je me souviens avoir découvert l’ampleur de la souveraineté de Dieu lors d’un cours de doctrine à l’Institut Biblique de Nogent-sur-Marne. Ce fut une révélation, une compréhension et une vision toutes nouvelles du monde dans lequel je vivais. Cette découverte a eu un impact profond dans ma relation avec le Seigneur. Même si l’on se forme en vue d’un service dans l’Église, le premier fruit d’une formation se voit dans la vie de l’étudiant.
Quelques mots au sujet des différents modes de formation
Si l’impérieuse nécessité de se former pour servir l’Église a été démontrée, disons encore quelques mots au sujet de l’offre et des modes de formation.
À l’heure actuelle, il existe comme jamais auparavant chez les Évangé- liques, une diversité de programmes de formations. Les institutions classiques (IBG, IBN, FLTE, etc.) ont significative- ment augmenté l’offre de formations. À cette tendance s’en ajoute une autre : celle des unions d’Églises qui dévelop- pent leur propre programme de forma- tion (CFB ou REF pour les CAEF, par exemple) avec des ambitions plus modestes que les instituts bibliques, mais plus facilement accessibles pour des personnes en activité professionnelle. C’est un excellent contexte pour prendre goût à la formation.
Il existe principalement 3 modes de formation :
• La formation en groupe ou « formation résidentielle » :
cycle à temps complet ou partiel en institut, formation en week-end ou semaine, cours du soir, etc. Si cette formule présente des contraintes matérielles (déplacement en un lieu donné, à un moment donné), elle a l’avantage du contact direct avec l’enseignant et de l’émulation que génère un groupe focalisé sur une même problématique. L’acquisition de la connaissance et de la compétence repose alors aussi sur les échanges qui existent au sein du groupe : comme dans un creuset, les arguments, les pensées, les exemples sont soumis au feu de la critique (positive) des autres étudiants, véritable tremplin de pro- gression personnelle.
• La formation par correspondance
Son grand avantage, c’est que l’étu- diant avance à son rythme, mais avec le risque de ne jamais terminer son parcours de formation. Pour des institutions telles que l’Institut Biblique de Nogent-sur-Marne ou la Faculté Libre de Théologie Évangélique de Vaux-sur-Seine, seul un tiers des étu- diants en moyenne arrive au terme du parcours de formation par corres- pondance. Cette manière de faire limite également la possibilité d’échanges avec l’enseignant.
• La formation en ligne sur internet (IBG online ou e-learning avec l’IBN)
Ce nouveau mode de formation connaît un succès croissant. Il combine l’avantage de pouvoir se former depuis son domicile tout en étant inté- gré à un groupe (discussion en forum) et de bénéficier de l’accompagnement d’un formateur animateur. Un par- cours de formation en ligne s’étale sur plusieurs semaines (6 à 8 en moyenne) ce qui oblige à un engagement de par- ticipation sur une durée relativement courte.
Il y a un effort à fournir…
Quel que soit le mode retenu, se for- mer demande une discipline personnelle. Une des clés de la formation, c’est de trouver une formule compatible avec les contingences de la vie de tous les jours. Un parcours de formation en ligne nécessite en moyenne 8 heures de tra- vail par semaine. Pour bien réussir une première expérience, n’ayez pas les yeux plus gros que le ventre. Il vaut mieux commencer modestement et aller au bout d’une première expérience, ce qui créera le désir de poursuivre avec une seconde étape de formation. C’est le début de la formation continue. Pour votre croissance, et pour celle de l’Église de Christ.
E.W.