Conçu par l’Esprit
par Reynald Kozycki
« Je crois en… Jésus Christ… qui a été conçu du Saint-Esprit, et qui est né de la Vierge Marie… »
Cet extrait du symbole des apôtres s’inspire de Mt 1.18-25 et Luc 1.26-38. C’est l’un des articles fondamentaux de la foi chrétienne. Si l’Eglise primitive pouvait confesser unanimement cette déclaration, aujourd’hui, ce n’est plus tout à fait le cas1.
Remise en question
Le bon sens commun aime à tourner en dérision le fait qu’une personne puisse naître par la vertu du Saint-Esprit. « Croire que Jésus serait né de cette façon, non mais, vous méprenez pour qui ? » entendons-nous souvent dire.
Le doute a gagné aussi les milieux chrétiens. Depuis près de deux siècles le protestantisme libéral a généralement abandonné la foi dans les miracles, dont la conception surnaturelle de Jésus, la résurrection… Depuis quelques décennies, la théologie catholique a, en partie, emboîtée le pas en remettant discrètement en question quelques-unes des déclarations bibliques2.
Par exemple, Jacques Duquesne, vulgarisateur des débats théologiques, et « grand journaliste catholique devant l’Eternel » explique l’improbabilité que Jésus soit né d’une vierge. Il cite C.-H. Dodd affirmant que « n’en ne s’oppose à ce que le Fils de Dieu soit aussi celui de Joseph ; la croyance en la conception virginale n’est pas essentielle à la foi chrétienne… ».
Mais devant les affirmations claires de la Bible, Duquesne explique qu’il s’agit tout simplement d’un théologoumène, c’est-à-dire une sorte d’image destinée à faire comprendre une affirmation de foi ; autrement dit, nous ne sommes plus ici du côté de l’histoire mais de celui du symbole qui veut exprimer une vérité profonde3.
C’est avec ce genre de pirouette que certains théologiens réfutent la réalité des miracles, et en particulier, celui de la conception par le Saint-Esprit.
Quelques éléments de réponse
a) Face aux incrédules, parfois il ne vaut mieux pas chercher à trop argumenter. La réalité de la Bible et de Dieu peut davantage être présentée par un témoignage personnel. L’aveugle de naissance guéri par Jésus disait simplement : « Je sais une chose : j’étais aveugle, maintenant je vois » (Jn 9). Avoir goûté et vécu dans sa propre vie, la fidélité du Seigneur, l’exaucement de plusieurs prières, développe une conviction profonde à propos de la véracité de la parole de Dieu.
b) Envers certaines personnes, il est possible de donner quelques arguments prouvant le sérieux de la Bible4. Par exemple, nous pouvons citer des prophéties concernant Jésus, dont celle de sa naissance miraculeuse annoncée en Es 7.14 (avec le parallèle de Mt 1.23)5.
c) Face aux personnes qui reprennent les arguments de J. Duquesne, expliquant par exemple que Matthieu et Luc sont les seuls à décrire une naissance miraculeuse, ou que ces textes sont à interpréter symboliquement, il faut rappeler quelques principes de foi. Dans la Bible, Dieu n’a pas besoin de répéter dix fois une chose pour qu’elle soit vraie. Si un auteur inspiré raconte la naissance miraculeuse de Jésus, nous prenons cela comme réel.
Dieu ne ment pas (Tt 2.1), toute l’Ecriture est inspirée par Lui (2 Tm 3.16). D’autre part, nous sommes placés devant l’accomplissement d’une prophétie extraordinaire (voir note 5 ci-dessous). Enfin, rappelons l’exemple des Sadducéens qui ne croyaient ni aux anges, ni à la résurrection, et à qui Jésus répond : « Vous êtes dans l’erreur, parce que vous ne comprenez ni les Écritures, ni la puissance de Dieu » (Mt 22.29).
En conclusion
La foi en la puissance miraculeuse de Dieu ne devrait pas poser de problème pour le croyant. Le Seigneur est le Souverain du monde, il fait ce que bon lui semble. Il avait annoncé que son Fils naîtrait dans ce monde par une vierge, l’ange Gabriel le rappelle à Marie qui a du mal, elle aussi, à le croire : « Comment cela se fera-t-il, puisque je ne connais point d’homme ? L’ange lui répondit : Le Saint-Esprit viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te couvrira de son ombre. C’est pourquoi le saint enfant qui naîtra de toi sera appelé Fils de Dieu… Car rien n’est impossible à Dieu. » (Lc 1.34-37)
Comme elle, recevons la Parole de Dieu dans sa simplicité, émerveillons-nous d’un Dieu pour qui rien n’est impossible, et comme les mages venus de l’Orient, reconnaissons en cet enfant le Roi non seulement des juifs mais le Roi des rois.
R.K.
NOTES
1. A l’exception de quelques « hérétiques » comme les Ébionites ou une partie des Gnostiques, la totalité des premiers chrétiens confessaient les vérités du symbole des Apôtres. Voir par exemple, Everett F Harisson, A short life of Christ. Eerdmans, 1977, p. 44 ss.
2. II est vrai qu’une aile non négligeable du catholicisme s’accroche non seulement à la naissance miraculeuse de Jésus (vérité clairement exprimée dans la Bible), mais soutient, bien au-delà du texte biblique, la virginité soi-disant perpétuelle de Marie. Nous ne développerons pas ici ce qui touche à Marie, un numéro spécial est en préparation sur ce thème.
3. Jacques Duquesne, Jésus. Flammarion, J’ai Lu, 1996, p. 35-36.
4. Pour une argumentation plus construite nous renvoyons au livre La Bible, vrai ou faux, AES, 2002, ouvrage collectif dirigé par Alain Stamp.
5. Certains relèveront que la prophétie de l’Ancien Testament ne parle pas nécessairement d une vierge. Le mot hébreu almâh en Es 7.14 signifie jeune fille (en âge de se marier). Dans la culture juive, ce mot désigne presque toujours une jeune fille vierge, c’est pour cela que la traduction très ancienne en grecque (LXX) qui est citée par Matthieu a fait le choix de traduire ce mot par partbenos qui signifie bien vierge. Dans l’abondante littérature consacrée à cette question, nous renvoyons en particulier au résumé d’Alfred Kuen, Encyclopédie des difficultés bibliques, Emmaüs 2002. Tome l (voir Mat 1.23).