Voir Jésus
par Alain STAMP1
« Parmi ceux qui étaient venus à Jérusalem pour adorer Dieu pendant la fête, il y avait aussi quelques personnes non-juives. Elles allèrent trouver Philippe qui était de Bethsaïda en Galilée et lui firent cette demande : Nous aimerions voir Jésus » (Jn 12.20-21)
Quelle belle demande !
Les versets 20 à 36 du chapitre 12 de Jean sont extraordinaires. Ce qui m’a arrêté, c’est cette expression formulée par ces non-juifs, par ces Grecs : « Nous voudrions voir Jésus ».
La formulation est excellente. Ils ne disent pas : « On voudrait en savoir plus sur Jésus ». Les chrétiens, eux, sont souvent affamés de nouvelles connaissances théoriques. Ce ne sont pas celles-ci qui nous manquent : notre théologie est « bonne », nous avons déjà étudié la vie du Christ plusieurs fois, nous connaissons beaucoup de choses sur la Bible. Ce dont nous avons besoin, c’est de VOIR Jésus. Il nous faut avant tout une expérience personnelle profonde, qui renouvelle entièrement notre intimité avec Jésus-Christ.
Les Grecs ont dit : « Nous voudrions le voir, le rencontrer, être face à face avec lui ». Nous n’avons pas besoin d’un message qui nous stimule à nous engager encore plus comme chrétiens. Nous n’avons pas besoin qu’on nous dise ce qu’un chrétien doit faire, ce qu’il ne doit pas faire. Parce que nous savons déjà que nous devrions nous engager davantage pour le Christ. Nous savons qu’il y a beaucoup de manques dans notre vie. Et les messages qui nous disent « il faut faire ceci, il faut faire cela » nous découragent en nous laissant face à nos lacunes. Ce dont nous avons besoin, avant même de nous engager davantage pour lui, c’est de le voir lui ! de le rencontrer ! C’est d’avoir une relation intime forte avec Christ ! J’espère que notre préoccupation personnelle est la qualité, la profondeur de notre relation avec Christ.
Espoir de puissance, de pouvoir
La discussion relatée dans Jn 12.20-36 se situe au lendemain de l’entrée de Jésus à Jérusalem acclamé comme un roi. Au verset 23, le Christ répond : « L’heure est venue où le Fils de l’homme va entrer dans sa gloire ». Nous savons quel espoir cette entrée de Jésus à Jérusalem a fait naître dans le cœur de toute une population. On pense que c’est lui qui, enfin, va s’opposer aux Romains et ôter le joug oppresseur. Ces Grecs, présents ou non lors de l’entrée triomphale de Jésus, en ont forcément entendu le récit, parce que tout le monde en parlait ; et c’est exactement pour ça qu’ils viennent : « On voudrait le voir, ce roi, ce nouveau roi, celui qui va renverser les situations et chasser les Romains ».
D’une manière ou d’une autre, c’est le roi qu’ils ont envie de voir et de rencontrer. Nous avons aussi envie parfois de rencontrer le roi, celui qui a l’autorité, celui qui interviendrait en puissance pour changer les choses dans notre vie, dans l’église, chez le voisin. Celui qui pourrait renverser les montagnes, supprimer les situations difficiles, nous épargner la souffrance, nous débarrasser de nos adversaires, nous ouvrir les portes. Nous aimerions un Evangile qui renverse tout sur son passage. Parfois nous sommes un petit peu comme les disciples dans la barque pendant la tempête : nous voudrions réveiller le Seigneur pour qu’il intervienne, pour qu’il agisse ! On se demande même pourquoi, s’il est Roi, il n’intervient pas avec plus d’autorité dans certaines circonstances difficiles.
Gloire et croix
Pourquoi ne voit-on pas plus sa gloire ? Jn 12.23 nous annonce que « le Fils de l’homme va entrer dans sa gloire », alors que le verset suivant dit : « Vraiment, je vous l’assure : si le grain de blé qu’on a jeté en terre ne meurt pas, il reste un grain unique. Mais s’il meurt, il porte du fruit en abondance ». Jésus associe sa gloire à sa mort, parce que la gloire du Christ, c’est la croix. Et à ceux qui veulent le voir, il dit bien : « Vous allez me voir ; vous allez me voir dans la gloire ; vous allez me voir à la croix ». Jésus attire les regards de ceux qui désirent le voir, sur quelque chose d’inattendu, de choquant, sur sa mort ; sur le fait qu’il est le grain de blé qui tombe en terre et qui meurt.
Jésus nous révèle vers quoi nous devons et pouvons regarder pour le voir : à la croix. Il ne s’agit pas d’un roi acclamé qui arrive, passe, et renverse tout sur son passage, mais d’un homme livré, subissant l’infamie du châtiment de la croix, crucifié, sacrifié pour nos péchés. Ce dont nous avons besoin, c’est de voir Christ dans son œuvre à la croix pour nous.
Pourquoi est-ce que nous recherchons d’abord un roi glorieux et agissant ? Parce que nous voudrions souvent faire l’économie de la croix, l’économie du brisement, de la repentance, du pardon.
Golgotha plus que Jérusalem
Dans Jn 12.31, Jésus dit : « C’est maintenant que va avoir lieu le jugement de ce monde. Oui, maintenant le dominateur de ce monde va être expulsé ». C’est à la croix que le monde est jugé.
Nous péchons, quoique chrétiens et nous nous savons faibles ; nous sommes souvent découragés, nous avons faim et soif de victoire et de pureté. C’est que nous avons besoin de voir Jésus-Christ crucifié. Parce qu’à la croix le monde a été jugé. Christ a porté TOUS nos péchés, il n’y en a pas un seul pour lequel il n’a pas payé le prix ! Et quand je vois Christ, je sais que plus aucune faute ne témoigne contre moi. Je sais que je peux le regarder et chercher à le voir à la croix aussi souvent que nécessaire, chaque jour, et jour après jour.
Comment vivons-nous notre vie personnelle ? « Oui, maintenant le dominateur de ce monde va être expulsé » (Jn 12.31). Nous sommes souvent vaincus par le diable dans notre vie chrétienne, nous sommes souvent attaqués. Le Malin nous dit :
« Regarde quel genre de chrétien tu es ! Regarde ton cœur ! Regarde comme tu tombes facilement dans les pièges que je te tends ! » Il a raison. Je tombe très souvent dans ses pièges. Mais quand je suis à la croix, quand je suis en face de mon Sauveur, je sais que plus aucune accusation ne peut tenir car deux vérités en découlent : mon péché est expié, pardonné, effacé, et celui qui m’accuse ne peut rien contre moi, puisqu’il est déjà expulsé de ma vie. Nous avons besoin de reprendre la mesure de l’œuvre du crucifié pour nous, de nous en nourrir et de nous en imprégner.
Dans le verset 33 du chapitre 12 de Jean, nous lisons : « Par cette expression, il faisait allusion à la manière dont il allait mourir ». C’est très clair. Ces hommes viennent, veulent voir Jésus, et Jésus leur répond : « Vous avez prioritairement besoin de me voir à la croix, vous avez besoin de voir que je donne ma vie pour vous, que j’accomplis à la croix une œuvre qui vous assure le plein pardon et qui règle une fois pour toutes la question du péché ». Voilà le point culminant, crucial ; la clé n’est pas Jérusalem, mais Golgotha.
La couronne après la croix
Mais ce n’est pas fini ! Regardez Jn 12.32 : « Et moi, quand j’aurai été élevé au-dessus de la terre, j’attirerai tous les hommes à moi ». C’est là que le roi apparaît, le Roi des rois, celui qui n’est pas de cette terre, celui qui ne tire pas sa gloire du nom d’une puissance temporelle. Voici le roi dont la gloire, l’autorité et la puissance viennent de Dieu lui-même, de sa soumission à la volonté et au plan de salut de son Père ; Jésus s’est volontairement soumis à la mort. « Je donne ma vie pour mes brebis », dit-il.
Le roi de gloire, le roi de puissance, le roi d’autorité, apparaît APRES la croix, car l’oeuvre de la croix précède la résurrection. Nous ne pouvons pas voir Christ le roi, avant d’avoir vu Christ le crucifié. Nous ne pouvons pas contempler notre roi sans voir l’agneau de Dieu : car l’agneau est sur le trône.
Un ciel ouvert
Revenons sur cet aparté que nous lisons dans Jn 12.27-28 : « A présent, je suis troublé. Que dirai-je ? Père, sauve-moi de cette heure ? Mais c’est précisément pour l’affronter que je suis venu jusqu’à cette heure ! Père, manifeste ta gloire ».
On dirait qu’au beau milieu de la conversation, Jésus nous ouvre une petite fenêtre sur son combat intérieur. Il nous révèle la profondeur de son amour pour les hommes. La fidélité de Christ, c’est d’aller jusqu’au bout. Les paroles de Jésus à ce moment-là ressemblent à celles qu’il prononce au jardin de Gethsémané : « Si c’était possible, que cette coupe passe loin de moi ». Mais c’est précisément pour souffrir la mort à la croix qu’il est venu.
Et comme il le fera à Gethsémané, il reprend : « Toutefois, pas ma volonté, mais la tienne ». Quel amour ! Quelle soumission ! Quelle lucidité aussi ! Il est parfaitement conscient qu’il va payer un prix que l’on ne peut pas mesurer.
Et le ciel s’ouvre : « Une voix se fît entendre, venant du ciel :
– J’ai déjà manifesté ma gloire et je la manifesterai à nouveau ». (Jn 12.28).
Le ciel n’est jamais ouvert pour nous autrement que par Jésus-Christ. Le ciel ne s’ouvrira jamais grâce à nos efforts, à notre mérite, à nos exercices de piété, à notre bonne attitude, à notre religiosité… Rien ne va ouvrir le ciel, sinon Jésus-Christ. Notre ciel est-il ouvert ou fermé lorsque nous prions, lorsque nous lisons la Parole de Dieu ? Comment est notre ciel dans notre vie de famille, d’église ?
Chaque fois que nous voulons un ciel ouvert, nous devons revenir à Jésus-Christ. Il faut que le péché soit jugé et l’adversaire expulsé. Quand un frère va vers un autre frère et lui demande pardon, le ciel s’ouvre. Quand un frère confesse son péché, le ciel s’ouvre. Nous avons besoin d’un ciel ouvert pour une communion plus profonde avec Dieu. Le ciel ouvert, c’est toute la puissance de Dieu à notre égard ; le ciel ouvert, c’est l’intervention de Dieu en permanence dans notre vie. On parle tellement de la puissance du Saint-Esprit, de la plénitude du Saint-Esprit ; mais la puissance et la plénitude du Saint-Esprit, c’est quand le ciel est ouvert et que nous voyons Jésus-Christ crucifié.
Libres de voir Jésus
Rappelons-nous Jn 12.32 : « Et moi, quand j’aurai été élevé au-dessus de la terre, j’attirerai tous les hommes à moi ». Quel ministère merveilleux que celui de Jésus : il donne sa vie, il maintient son choix d’aller jusqu’au bout afin de mourir pour que nous ayons la vie, il ressuscite et maintenant il nous attire à lui ! Ce qui veut dire que rien ne nous retient d’aller à Christ. Oui, nous sommes pécheurs, nous sommes tentés, mais nous devons nous rappeler que nous pouvons voir Christ aussi souvent et aussi facilement que nous le souhaitons parce qu’à la croix, le péché a été jugé et l’accusateur expulsé.
Nous devons nous appuyer sur l’œuvre de Christ à Golgotha pour notre vie et notre marche chrétienne. Nous devons avoir le courage d’appeler le péché, « péché » ! Si Jésus attire les regards de ceux qui veulent le voir sur la croix, c’est précisément à cause du péché. Ce qui nous empêche de voir Christ, de progresser dans notre vie chrétienne, d’être victorieux, ce sont nos péchés. Si nous voulons voir Jésus nous devons absolument les laisser et les confesser. Voulons-nous voir Jésus ?
Alors appelons la jalousie, « jalousie », l’envie, « envie », la critique, « critique », l’impureté, « impureté », examinons notre vie, notre cœur. Quelle pensée avons-nous tolérée, entretenue ? Quelle question aurait dû être réglée et ne l’a pas été ? Dans quel domaine avons-nous baissé les bras et avons-nous cessé de combattre et de résister pour rester purs ? Appelons « péché » ce qui est péché dans notre vie et venons à Jésus pour le voir.
La gloire de Jésus, c’est la croix : à ses pieds nous pouvons voir le Christ, son œuvre, notre ciel s’ouvre vers Dieu, et nous obtenons la victoire que notre Roi a remportée.
A. S.
Note
1 : Alain Stamp est missionnaire en Alsace avec France pour Christ. Nous le remercions d’avoir autorisé Servir à publier le texte de cette prédica-tion prononcée à Vendenheim récemment. Le style oral a été conservé.