Si c’est comme chrétien…

 

(1 Pierre 4.16)

 

Par Robert SOUZA

 

Souza

 piedsL’apôtre Pierre déclare heureux ceux qui sont insultés pour le nom du Christ. Intégrer cette vision des choses exige de nous un profond changement de mentalité, le renouvellement de notre intelligence. Souffrir comme chrétien n’est pas en dehors de la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréé et parfait1.

 

 

 

Mais Pierre prend garde de qualifier ses propos par deux « si » : Si vous êtes insultés pour le nom du Christ ; si c’est comme chrétienIl soulève là un lièvre qu’il vaut la peine de poursuivre !

 

Discerner l’origine des ennuis

 

Nous pouvons être surpris de découvrir que l’apôtre recommande aux chrétiens d’éviter les souffrances qu’entraînerait une condamnation pour meurtre ou pour vol ! Toujours est-il que nous avons besoin d’être alertés au sujet de raisonnements simplistes du genre : « Je suis chrétien. Je souffre. Donc, je souffre comme chrétien. » Les choses ne sont pas si simples ! Pierre lance un appel au discernement. « Je suis chrétien. Je souffre. Mais quelle est l’origine des insultes ou des tracasseries que je subis ? » Nous devons envisager que, dans bien des situations, nous ne sommes pas « blancs comme neige ». Par manque de sagesse, de rigueur, de tact ou d’humilité, nous provoquons parfois des réactions négatives qui sont sans rapport direct avec notre engagement chrétien. Nous n’avons peut-être pas volé ou tué, mais nous devons nous demander honnêtement si nous n’avons pas fait le mal, si nous ne nous sommes pas mêlés de ce qui ne nous regarde pas. En d’autres termes, quelle est notre part de responsabilité pour ce qui nous arrive de désagréable : le jugement commence par la maison de Dieu. Commençons par balayer devant notre porte.

 

 

Bénédiction ou « piston » ?

 

Prenons un exemple (toute ressemblance avec des situations vécues n’est pas entièrement fortuite). Une Église locale qui vit la bénédiction d’une forte croissance numérique sollicite un permis de construire pour l’édification d’un nouveau local plus spacieux. Le permis est refusé. Le courant « complotiste » dans la communauté soupçonne une intervention de la franc-maçonnerie. Le courant « diabolisant » dénonce un « coup de Satan » qui aurait empoisonné l’esprit des fonctionnaires chargés du dossier.

Les plus spirituels des membres sont déboussolés : « Nous avons la ferme conviction que ce projet est dans la volonté de Dieu. »

 

Finalement, quelqu’un prend le temps de lire calmement l’exposé de ce qui a motivé le rejet du dossier. On découvre que, lorsqu’il a été rempli, on a bâclé le travail : rubriques non renseignées, pièces manquantes… Il n’y a plus qu’à s’humilier et à tout recommencer – avec sérieux et application.

 

Nous serions les premiers à crier au scandale si des associations non chrétiennes bénéficiaient de passe-droits. Nous croyons que Dieu bénit au-delà de ce que nous pouvons demander ou imaginer. Nous croyons aussi que le coeur du roi est comme un cours d’eau entre les mains de l’Éternel : il le dirige à son gré2. Mais la bénédiction de l’Éternel n’est pas une forme de « piston » qui court-circuite les contraintes légales ou les procédures normales et nécessaires.

 

Comme se mêlant des affaires d’autrui

 

Le sens exact du mot que Pierre emploie est difficile à préciser. Un commentateur propose : « celui qui fait preuve d’une curiosité déplacée et en conséquence d’un activisme illégitime. » Et il ajoute : « Pour en préciser la portée, les hypothèses n’ont pas manqué : agitateur politique, informateur ou dénonciateur, adepte de quelque secte illuministe, etc. Faute d’éléments d’appréciation, on y verra surtout une sorte de mise en garde adressée aux chrétiens : il n’est pas juste de s’immiscer, sous prétexte religieux, dans la vie des autres et de vouloir régenter la vie sociale. En tout cas, si des ennuis arrivent à ce titre, ils ne rentrent pas dans la sphère des souffrances pour le Christ. »3

 

 

L’extrémisme ennuyeux

 

On méditera aussi avec profit quelques expressions employées par Paul, écrivant à Tite, dans des exhortations adressées à différents groupes dans l’Église. Le comportement qu’il préconise pour les femmes mariées, c’est pour qu’on ne calomnie pas la parole de Dieu. Pour être un exemple pour les jeunes gens, Tite doit apporter un enseignement pur, digne, une parole saine, inattaquable, pour que l’adversaire soit confus et n’ait rien de mal à dire de nous. En paroles et en actes, les esclaves sont exhortés à faire honneur en tout à l’enseignement de Dieu, notre Sauveur.4

 

Lorsque nous allons plus loin que la Parole elle-même (dans la rigueur ou la permissivité), que nous affirmons comme « bibliques » des idées tout humaines ou que nous tranchons, d’autorité, des questions où la Bible laisse subsister une part de mystère, nos propos deviennent attaquables. Certains chrétiens entretiennent des convictions personnelles très fortes (au sujet des origines, des derniers temps…), au point de ne plus distinguer ce que la Parole dit expressément de ce qu’ils aimeraient qu’elle dise, au point même d’ajouter à l’Évangile des idées qui ne font pas partie de la foi transmise aux saints une fois pour toutes. C’est ainsi que la Parole de Dieu se trouve calomniée… Nos extrémismes nous attirent des ennuis et génèrent des souffrances qui ne devraient pas nous réjouir, mais plutôt nous faire réfléchir.

 

Vous aurez des tribulations dans le mondeSi c’est comme chrétien, glorifie Dieu !

 


NOTES

 

1. Rm 12.2

 

 2. Pr 21.1

 

3. Samuel Bénétreau, La première épître de Pierre, Édifac, p. 254

 

4. Tt 2.5, 8, 10