Relancer

la croissance dans

le monde développé

 

David SmithDAVID SMITH
DIRECTEUR DU
PERTH BIBLE
COLLEGE
(AUSTRALIE)

 

 

Introduction : la tension

 

L’appel à relancer la croissance peut être compris de différentes façons :

• Comme un appel à dynamiser et à rendre plus efficace ce qui se fait déjà dans l’Église et par les ministères associés.

• Comme un appel à trouver de nouvelles façons d’augmenter l’efficacité de nos Églises et ministères, dans l’espoir d’une plus grande réussite.

• Comme un appel à l’introspection pour confirmer notre besoin de croître en fidélité à Dieu, à sa Parole, et dans notre service, pour être sel et lumière pour Christ.

• Comme un appel à regarder autour de nous et à adapter l’Église et ses ministères au contexte changeant de notre époque afin d’être pertinents et efficaces.

 

En fait, il nous faut entendre l’appel de toutes ces façons. L’Église est toujours sous tension entre stabilité et changement, entre pertinence et fidélité.

 

 

Les icônes du monde actuel

Le canapé

 

Le monde développé est assis sur un canapé. De là, il cherche à maximiser son confort et son plaisir. Nous croyons que nous avons un droit absolu à être épargnés par les problèmes, les difficultés et les crises. La recherche du confort est motivée par le désir de bien vivre, mais dérive facilement vers le désir de protéger notre vie. En tant que chrétiens, nous croyons que le confort est un droit garanti par Dieu lui-même, et même une bénédiction.

Le monde développé s’est détourné de la foi pour se tourner vers le dieu du canapé. Donc, la personne qui cherche à vivre en toute sécurité sur son canapé est devenue – malgré le luxe et le plaisir apparents – quelqu’un en grand besoin de thérapie. Où sont passés ceux qui sont prêts à perdre leur vie pour la cause de Christ ?

 

Le marché

 

Le monde développé fait son marché. Nous sommes inondés de messages au sujet de nos besoins et désirs, réels ou imaginaires, et de la débauche de choix possibles. On assiste au développement exponentiel de l’exigence de satisfaction sans attente des désirs de plaisir. Le monde développé s’est détourné de la foi pour se tourner vers le dieu du marché. Le matérialisme et la consommation, carburants de nos vies et de nos systèmes économiques, ne produisent plus ce que les médias continuent à vanter : l’épanouissement. La personne qui cherche à s’accomplir à travers les possibilités du marché se retrouve à vide, avec un besoin désespéré de trouver un nouveau menu qui propose d’autres satisfactions. Où sont passés ceux qui sont contents en toutes circonstances ?

 

Le blog

 

Le monde développé exige qu’on l’écoute. La transition du modernisme au postmodernisme comporte l’abandon de la recherche d’un discours unifié qui fait autorité et l’adoption d’une culture où tous les discours sont de valeur égale. Voici venue l’ère du pluralisme où toutes les philosophies possibles doivent être tolérées et reconnues valides. Sur Internet et les réseaux sociaux, mon blog sera perçu comme ayant autant de valeur qu’une dépêche de l’AFP, son importance étant déterminée par le nombre de fois qu’elle a été « vue ».

Le monde développé s’est détourné de la Parole de Dieu pour se tourner vers « ma » parole. Nos contemporains ne trouvent rien en eux-mêmes qui donne du sens ou des valeurs. La personne se retrouve perplexe, à la recherche d’une direction et d’une autorité, pour échapper au chaos et à la compromission. Où est passée la Parole de Dieu vue comme ce qui fonde la vie ?

 

YouTube

 

Le monde développé exige qu’on le regarde. Le phénomène YouTube a permis la diffusion mondiale de l’idolâtrie de soi. On veut que les autres fassent attention à nous et nous apprécient. Le centre de l’univers n’est ni Dieu, ni la foi, ni la tribu, ni la famille, mais l’individu. On ne se contente plus d’être remarqué, on veut être diffusé au grand public, et même devenir célèbre. Le monde développé ne veut pas faire partie d’une vision, mais être la vision en elle-même. La personne qui réclame qu’on la regarde, cherchant à être reconnue et considérée, se retrouve fragile, dans un monde où la reconnaissance peut être aléatoire. Où est passé le monde du « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés » ?

 

On remarque que ces quatre icônes, qui invitent à rechercher le confort, le choix, une voix et la célébrité, détournent nos regards du monde extérieur et orientent vers l’individualisme, vers le domaine où je suis dieu.

Cette problématique concerne aussi les Églises, car leurs membres ont été influencés par les icônes de notre époque. Pour relancer la croissance, nous devons commencer par nous examiner nous-mêmes. « N’avons-nous pas choisi de nous retirer dans nos communautés bien protégées, dans notre petit ciel sur la terre, où nous nous occupons de nous-mêmes, à l’abri du monde méchant et cruel ? »

 

 

Les réponses des Églises

 

Les Églises ont réagi en proposant :

• Pour le canapé de l’humanisme : du confort par la thérapie.

• Pour le marché du matérialisme : du choix à travers un « menu » varié.

• Pour le blog du pluralisme : l’écoute de chacun jusqu’à la compromission.

• Pour le phénomène YouTube du narcissisme : la célébrité par le spectacle. Nous devons trouver un point de contact. Notre attachement à la fidélité ne doit pas nous empêcher de nous connecter. En conséquence, nous devons parler à notre culture avec un message qui vient de Dieu, parce que nous vivons essentiellement en Christ. Quelles pistes Dieu nous donne-t-il pour rester fidèles tout en étant pertinents aujourd’hui ? Il nous faut nous tourner vers la Parole qui révèle le coeur de notre Dieu éternel, plein d’amour et qui désire la réconciliation.

 

 

Des icônes bibliques

 

Pour répondre aux icônes du monde, nous trouvons des icônes bibliques qui peuvent nous guider pour préserver la fidélité et apporter la vie au monde.

 

La mission de la croix… au lieu du canapé

 

En Hébreux 11.39 à 12.3, ni canapé ni confort, ni insécurité ni thérapie ne sont mentionnés. Il y a un appel à entrer dans le grand récit de la rédemption. Nous sommes confiants, car nous savons que Dieu nous a choisis pour participer à son grand dessein, et nous sommes encouragés à être prêts à renoncer à tout pour Christ, sans réserve.

Nous ne pouvons pas accomplir notre mission en évitant la croix. La croix se dresse comme l’icône du don de soi jusqu’au sacrifice et de la participation à la vie de ceux que Dieu aime, nos voisins, notre monde. Levons-nous du canapé et mettons-nous en route à l’aide de la croix, pour remplir une mission d’amour pour le monde.

 

La communauté de la table… au lieu du marché

 

L’icône de la table évoque la relation et l’unité. Ici tous les membres de la famille sont égaux, ils sont acceptés et non jugés, ils découvrent leur identité et s’épanouissent dans l’amour. À la table, nous préférons la famille à notre personne, et la relation à l’autosatisfaction.

Il n’y a ici aucun égoïsme, mais une communauté intime et bienfaisante, par l’unité en Christ. Au coeur de l’Évangile, il y a la relation et la plénitude, l’être-ensemble en Christ.

Christ renouvelle notre relation avec Dieu par son amour qui s’engage. Le désir que le Christ exprime ici est que les gens comprennent que Dieu les aime, autant que le Père aime Jésus. Exposons notre communauté centrée sur Christ et notre unité dans l’amour à la vue du monde.

Que devons-nous faire pour donner corps à cette unité, pour que la table devienne notre icône et que le monde le remarque ?

 

Le Roi – l’espérance – la Parole… au lieu du blog

 

En Apocalypse 1.12-18, il n’est pas question de ma voix, mais plutôt de mon silence. Pas de confusion ou de compromission, mais la rencontre du Roi saint, glorieux et souverain, celui qui est la Parole, Roi de l’espérance et de la certitude. Pourtant, il est le Roi serviteur, qui pose sa main sur notre épaule et, par ses paroles, infuse dans notre être paix, espérance et vie.

Comment vivons-nous avec la Parole de Dieu ? Est-ce que nous la rencontrons dans une explosion de gloire, qui nous réduit au silence et nous amène à nous prosterner pour adorer ? Ou sommes-nous plutôt portés à compromettre son autorité, cherchant à contourner ses exigences pour rassurer nos auditeurs et être hyper-pertinents ? C’est un message qui dissout le pluralisme par la présentation d’une parole vivante qui interpelle.

Il nous faut proclamer la Parole de Dieu, par l’Esprit qui inspire la foi avec profondeur et autorité, mais aussi avec la grâce personnalisée.

 

La bassine – l’amour – le serviteur… au lieu de YouTube

 

Dans l’évangile de Jean (13.1-5), on n’est pas dans la célébrité et dans la mise en scène de soi. Il n’y a là qu’un serviteur avec une bassine et une serviette, et qui se savait en relation avec le Père. Ayant toute chose en son pouvoir, il devient le sans-pouvoir afin de servir et d’honorer ses disciples. Renonçant à lui-même, il se met au service des autres.

Comment vivons-nous avec l’idée d’être serviteurs ? Connaissons-nous bien l’époque où nous vivons ? Savons-nous qui nous sommes ? Des enfants que Dieu chérit, et non de petites personnes fragiles ; des serviteurs aimés qui participent à la mission de Dieu, envoyés pour honorer les autres par l’amour et la grâce de Dieu, pour les servir avec l’amour du Père, pour atteindre ceux qui sont abattus.

 

 

Rétablir le contact

 

Comment pouvons-nous communiquer avec toutes ces personnes en manque d’assurance, vides, troublées et fragiles ?

• Ceux qui se consacrent à la recherche du confort ont besoin d’une mission, un but, une vraie raison de vivre.

• Ceux qui exigent de choisir ont besoin de relations à l’intérieur d’une communauté qui les soutient.

• Ceux qui veulent faire entendre leur voix ont besoin d’une parole souveraine d’espérance.

• Ceux qui courent après la célébrité ont besoin de savoir qu’ils sont aimés tels qu’ils sont, plutôt qu’être reconnus pour leurs performances. Nous devrons trouver les méthodes appropriées qui nous permettront d’établir le contact sans déformer le message pour l’adapter aux demandes du monde. Pour cela, dans notre génération, il nous faut incarner le message, vivre la Parole de Dieu, être authentiques et vrais. La porte est celle de la confiance. Nous devons apporter de vraies réponses à leurs véritables besoins.

 

 

Conclusion

 

Les icônes du monde dirigent les regards vers soi. Les icônes bibliques nous transportent au-delà de nous-mêmes vers Dieu.

• Elles éliminent notre manque d’assurance par l’appel de la croix, un appel à entrer dans une mission plus vaste.

• Elles nous conduisent non pas vers l’isolement, mais vers une relation choisie, unifiée, qui soutient et satisfait. Elles nous introduisent dans une communauté d’amour.

• Elles font taire le pluralisme et la confusion et nous apportent un message de notre Souverain qui fait naître la confiance dans nos coeurs, une espérance certaine.

• Elles détruisent les idoles de l’égoïsme et de la suffisance, et nous donnent une valeur qui vient directement du trône de la grâce. Nous sommes les enfants précieux de Dieu, nous avons le privilège de le représenter et d’élever les autres vers les bras du Père où l’on trouve la vie.

 

Lisez encore 2 Co 5.14-21. Voici notre vocation et notre mission, dans la puissance de Christ. À lui soit toute la gloire, maintenant et à jamais. Amen.

 

TEXTE TRADUIT ET CONDENSÉ PAR ROBERT SOUZA ET FRANÇOISE LOMBET