Seul devant l’écran :
pris dans la toile
Par Reynald Kozycki
Fin février 2011, en abordant ce thème, je posais la question de l’usage des écrans à quelque 150 jeunes d’environ 16-25 ans réunis. Tous avaient, évidemment, un téléphone portable, plus de la moitié un smartphone, tous ont un accès régulier à internet à leur domicile, et près des deux tiers ont leur ordinateur personnel. L’usage des écrans (télé, téléphone, internet, jeux vidéo…) est totalement généralisé dans notre société1. Presque personne ne souhaiterait d’ailleurs revenir à une période pré-internet ou pré-TV, et, en même temps, nombreuses sont les voix qui s’élèvent contre les dangers de ces écrans.
Un peu trop accro
Comme toujours, l’abus est dangereux et peut devenir une véritable « addiction ». La personne concernée mesure rarement à quel point elle est accro2. Certains signes ne trompent pas. La vie personnelle et sociale de cette personne s’organise autour de son écran, par les jeux vidéo, des programmes télé ou de sa connexion internet. Elle éprouve un manque profond, une « anxiété désorganisatrice », lorsqu’elle ne parvient pas à se connecter. Elle se préoccupe de moins en moins de la relation authentique avec son entourage familial ou ses amis. Les mauvaises habitudes se prennent tôt et l’adolescent est particulièrement fragile devant l’écran surtout s’il n’est pas très bien dans sa peau. Les études montrent que les garçons auraient tendance à rechercher une posture de « dominance » à travers les jeux (d’argent ou en réseau) et la cyberpornographie. Les filles recherchent davantage des amitiés romantiques virtuelles, des « bavardages » sur les messageries instantanées ou glissent parfois dans l’achat compulsif.
La cyberpornographie
D’un simple clic, seul devant son écran, il est devenu tellement facile de sombrer dans un univers de délires sexuels. La cyberpornographie touche majoritairement les hommes (72 %) bien que la proportion des femmes se soit beaucoup développée ces dernières années. Plus de 40 % des connexions sur internet aboutissent à un site classé X. 64 % des achats sur internet sont du domaine pornographique. Ces dérapages laissent des traces.
Chez les garçons, on constate souvent un comportement étrange avec les filles, certains complexes apparaissent vis-à-vis de leur notion d’activités et de performances sexuelles. Une image souvent dégradée de la femme se développe. Leur « appétit sexuel » est attisé et déréglé notamment par des masturbations incontrôlables…
Les filles prises dans cet engrenage se demandent souvent comment elles peuvent concurrencer les « cybercréatures » de rêve, si leur corps est assez mince, si leur poitrine est « suffisante » : une préoccupation obsessionnelle du corps se développe. Elles pensent qu’elles n’ont plus à repousser les avances des garçons, elles se demandent comment attirer leur attention et surtout comment la retenir3.
Le chrétien
Il n’est évidemment pas à l’abri des dérapages possibles, bien au contraire.
Le bien, parfois l’ennemi du mieux
On peut tout à fait rester sur des activités relativement pures, répondre à ses emails, échanger régulièrement sur les réseaux sociaux, parcourir des sites d’actualités, voire d’édification chrétienne, tout en développant un esprit de « butinage ». On passe d’un site à l’autre sans pouvoir accomplir les objectifs que nous nous sommes fixés, en « perdant » beaucoup de temps. Nous risquons non seulement de passer à côté d’un temps mieux utilisé, plus constructif, mais aussi de devenir des proies faciles pour tomber plus bas (jeux en lignes, achat compulsif, cybersexe…).
Cybersexe
Plusieurs leaders évangéliques affirment que, notamment aux États-Unis, 40 % des hommes dans les Églises évangéliques reconnaissent, plus ou moins, avoir cédé à la cyberpornographie4. L’un des dangers pour le chrétien, outre ceux vus précédemment, est que la pornographie « blasphème » les interdits divins donnés pour notre protection. L’adultère ou la débauche sexuelle y sont fortement encouragés. La convoitise des yeux et de la chair est attisée alors que Jésus nous dit : Quiconque regarde une femme pour la convoiter a déjà commis adultère avec elle dans son coeur (Mt 5.28).
Comment en sortir ?
Le verset précédent se poursuit par les mots : Si ton oeil doit causer ta chute, arrache-le et jette-le loin de toi. On ne plaisante pas avec le péché. Laisser son petit doigt ou son oeil, c’est entrer dans un engrenage diabolique duquel on ne sort pas facilement.
Quelques idées :
• Comprendre les conséquences du péché et de nos égarements : Ne vous égarez pas : on ne se moque pas de Dieu. Ce qu’un homme aura semé, c’est aussi ce qu’il moissonnera. Celui qui sème pour sa propre chair récoltera la moisson de la chair : la pourriture (Ga 6.7-8 NBS) ;
• Envisager sérieusement de se séparer quelque temps des écrans ou de ce qui est occasion de chute ;
• Comprendre la puissance de vie en Christ : Car l’amour de Dieu consiste à garder ses commandements ; et ses commandements ne sont pas pénibles, parce que tout ce qui est né de Dieu triomphe du monde, et voici la victoire qui triomphe du monde : notre foi (1 Jn 5.3-4) ;
• Rendre compte à une personne de confiance de notre usage des écrans et prier avec cette personne : Fuis les passions de la jeunesse et recherche la justice, la foi, l’amour, la paix, avec ceux qui invoquent le Seigneur d’un coeur pur (2 Tm 2.22) ;
Tout m’est permis, mais tout n’édifie pas. Oui à ces outils intéressants que sont les « écrans », mais attention à ne pas « se faire prendre dans la toile ».
R.K.
NOTES
1. On peut consulter notamment l’enquête Sofres du 14/12/2010 pour Microsoft, Les Français et leur écran.
2. On peut consulter le site www.cyberdependance. fr ou lire les ouvrages de Jean-Charles Nayebi. Parmi les auteurs chrétiens mentionnons le psychiatre Samuel PFEIFER, La cyberdépendance, Éditions Empreinte, 2010.
3. Voir le dossier 9, Ça s’exprime, des services de santé québécois.
4. Voir par exemple les prédications de Wayne Gruden en mp3 sur la sanctification (n°3) sur le site mongernism.com.