La louange, une fin en soi ?

 

ou un élément de piété communautaire !

 

 trompetteLouange

 

par Joël LEFLAEC1

 

 

 

Venez, chantons avec allégresse à l’Eternel, poussons des cris de joie vers le rocher de notre salut. Allons au-devant de Lui avec des louanges, faisons retentir des cantiques en son honneur. Car l’Eternel est un grand Dieu ! Il est un grand roi au-dessus de tous les dieux. Il tient dans sa main les profondeurs de la terre et les sommets des montagnes sont à Lui. La mer est à Lui, c’est Lui qui l’a faite – la terre aussi, ses mains l’ont formée. Venez, prosternons-nous et humilions-nous ; fléchissons le genou devant l’Eternel notre Créateur, car II est notre Dieu, et nous sommes le peuple dont II est le berger, le troupeau que sa main conduit. »

 

« La musique est une des activités humaines instituées par Dieu dans le cadre de l’alliance créationnelle. Son sens ultime est déterminé par la présence du Seigneur : soit il s’accorde avec le dessein divin, soit il s’oppose à Lui dans une aliénation rebelle » – William Edgard.

 

Nous trouvons la première référence à la musique en Genèse 4, où il est dit que Youbal est l’ancêtre de ceux qui jouent de la harpe et du chalumeau. Certains discernent ici la découverte de la musique – d’autres voient plutôt le début d’une expression instrumentale. Plusieurs autres, dont Alfred Kuen dans Oui à la musique, soulignent des passages évoquant une expression musicale dans le ciel – par exemple Job 38.4-7 : « Où étais-tu quand je fondais la terre ? Dis-le, si tu as de l’intelligence. Qui en a fixé les dimensions, le sais-tu ? Ou qui a étendu sur elle le cordeau ? Sur quoi ses bases sont-elles appuyées ? Ou qui en a posé la pierre angulaire, alors que les étoiles du matin éclataient en chants d’allégresse, et que tous les fils de Dieu poussaient des cris de joie ? »

 

William Edgard souligne le texte de Sophonie 3.17 : « L’Eternel, ton Dieu, est au milieu de toi, comme un héros qui sauve ; il fera de toi sa plus grande joie ; il gardera le silence dans son amour ; il aura pour toi des transports d’allégresse… » – cette dernière expression pouvant être traduite « chants de triomphe ».

 

Plusieurs textes dans l’Apocalypse soulignent la présence du chant dans les lieux célestes, en particulier par l’invention du Cantique de Moïse et du Cantique de l’Agneau.

 

 

Quelques enseignements de ces indications

 

II serait hasardeux de dire que la musique – ou du moins notre expression musicale – vienne directement du ciel ; mais l’évocation d’une expression musicale dans le ciel, quelle que soit la forme de cette expression, ne nous permet pas de nous en approprier la paternité. Le fait que nous ayons un panorama si large d’une expression musicale avant la création et jusque dans l’éternité, nous montre que ce moyen d’expression – ou du moins un aspect de cette expression – en a été confié à l’homme dans l’alliance créationnelle.

 

Si l’homme n’est donc pas l’auteur de la musique, mais seulement le dépositaire de ce potentiel créatif que Dieu met à sa disposition, il ne peut s’en attribuer les droits d’auteur. On pourrait objecter que la notion de musique ne devient réelle que dans un contexte physique – parce que le son repose sur la vibration de l’air : on peut en dire autant de la parole…

 

 

La musique – y compris le chant : but et fonction

 

Nous sommes créés à l’image de Dieu (Gn 1.26) et l’homme est la seule créature avec qui Dieu communique. Paul dans son épître aux Ephésiens (1.3-12) nous dit que nous avons été créés pour aider à célébrer la gloire de Dieu. Nous voyons dans la construction du temple, ce désir du peuple d’Israël. Ensuite l’expression musicale dans le culte deviendra plus structurée et guidée par un ministère bien défini, bien réfléchi : les équipements, les matériaux, le personnel sont clairement signalés : c’est ainsi que dans 1 Chroniques 23.5 il nous est signalé la présence de Lévites spécialement chargés de louer l’Eternel et de travailler à la vie d’adoration du peuple d’Israël.

 

Dans le Nouveau Testament nous constatons la même finalité :

 

Dieu lui-même est la source de notre adoration : il en est aussi l’objet. Nous devons tout faire pour la gloire de Dieu ; le ministère de la musique dépend de notre vie d’adoration – lire Colossiens 3.16 et Ephésiens 5.19.

 

Un ministère d’adoration est lié à la promesse de Dieu. C’est en 1 Chroniques 28.20 que David dit à Salomon son fils : « Fortifie-toi, prends courage et agis – ne crains point, ne t’effraie point, car l’Eternel qui est mon Dieu sera avec toi. Il ne te laissera point, II ne t’abandonnera point, jusqu’à ce que tout l’ouvrage pour la maison de l’Eternel soit achevé ».

 

C’est également un ministère développé par des serviteurs de Dieu. Les Lévites étaient des serviteurs consacrés ; les chapitres 3 et 4 du livre des Nombres mettent en évidence une progression intéressante à leur égard :

 

a) Ils sont mis à part par Dieu lui-même.

 

b) En réponse, ils s’offrent eux-mêmes à Dieu.

 

c) Le peuple s’associe pour offrir les Lévites à Dieu.

 

d) En conséquence, Dieu qualifie les Lévites pour leur fonction.

 

e) L’oeuvre de Dieu accomplie selon sa volonté, est bénie par lui.

 

Le chapitre 5 de 2 Chroniques (à lire !) se termine ainsi : « Les sacrificateurs ne purent pas y rester (dans le sanctuaire) pour faire le service, à cause de la nuée ; car la gloire de l’Eternel remplissait la maison de Dieu ». Il n’est pas question ici de réussite, de crédibilité – il est question de la bénédiction réelle de Dieu. Que d’applications pour l’Eglise aujourd’hui !

 

La qualité de l’expression musicale dans l’église ne dépend pas premièrement de son niveau technique. Dieu ne se laisse pas impressionner par ce qui peut nous sembler un idéal. Les expériences vécues par le peuple d’Israël nous rappellent qu’avant toute chose, Dieu s’intéresse à notre obéissance à sa Parole. Ne prenons pas le risque de chercher à répondre à une baisse de niveau spirituel par des compensations illusoires. La louange n’échappe pas à ce risque.

 

Si le chant est intimement lié à l’expression de la foi, c’est en travaillant la qualité de notre foi que nous pourrons mieux affiner, avec l’aide de ceux que Dieu équipe pour cela, l’expression qui en découle. Comme dit le psalmiste : « J’avais mis en l’Eternel toute mon espérance, II s’est incliné vers moi, II a écouté mes cris, II m’a retiré de la fosse de destruction, du fond de la boue ; et II a dressé mes pieds sur le roc, II a affermi mes pas. Il a mis dans ma bouche un cantique nouveau, une louange à notre Dieu. Beaucoup l’ont vu, et ont eu de la crainte, et ils se sont confiés en l’Eternel » (Ps 40.2-4).


Et comme dit l’apôtre Paul : « C’est de lui, par lui et pour lui que sont toutes choses ».

 

J.L.


NOTE

 

1. : Quelques extraits d’une conférence de Joël Leflaec donnée en septembre 1994 lors du colloque « Pour une louange renouvelée » organisé à Vaux-sur-Seine par l’Association d’Eglises de Professants.