Une évangélisation « réussie » – 2 Co 4.1-6
par John BAIGENT
Nous nous décourageons bien facilement lorsque nous nous efforçons d’obéir à l’ordre du Seigneur de communiquer la bonne nouvelle de Jésus à tout le monde… (voir Mc 16.15). Les événements rapportés dans les premiers chapitres du livre des Actes nous font envie : tant de milliers de personnes qui viennent à la foi et sont ajoutées à l’Eglise ! Ceci se produit encore de nos jours ici ou là, mais dans bien des régions, la communication de l’Evangile nécessite de grands efforts suivis de peu de résultats. Il nous semble parfois que nous nous escrimons contre un mur impénétrable. Pourquoi notre évangélisation n’est-elle pas plus efficace ? Quels sont les facteurs que nous devons prendre en compte lorsque nous évangélisons ? Pouvons-nous concevoir une action qui soit suivie d’un succès assuré ?
La lecture du passage cité ci-dessus – extrait d’une lettre adressée par l’apôtre Paul aux chrétiens de Corinthe – peut nous aider à analyser quelques aspects du problème. Dans les réflexions qui suivent, j’utilise le terme « prédicateur » pour désigner toute personne qui s’efforce de communiquer l’Evangile, quelles que soient les méthodes utilisées pour cette communication. « Prêcher » peut signifier converser avec une autre personne ; ou chanter des paroles comportant un message biblique ; ou figurer dans une présentation visuelle artistique d’un récit biblique ; ou concevoir une affiche ; ou écrire un traité ; ou bien sûr donner un message bien préparé et bien construit lors d’une réunion !
Les tentations du prédicateur
Nous devons noter quatre dénégations de Paul dans l’extrait de sa lettre :
1. Nous ne nous décourageons pas (v. 1).
2. Nous n’avons point une conduite astucieuse (v. 2).
3. Nous n’altérons point la Parole de Dieu (v. 2).
4. Nous ne nous prêchons pas nous-mêmes (v. 5).
Il peut s’agir de choses dont Paul a été accusé à Corinthe par ses détracteurs ; ce sont en tout cas des tentations qui assaillent tout prédicateur potentiel de l’Evangile.
Le découragement peut résulter d’une absence de résultats, ou d’une opposition au message, ou des souffrances que suscite cette opposition. La tentation qui s’ensuit, est d’arrêter. Ce fut plusieurs fois l’expérience de Paul – lire par exemple Ac 17,32-34 et Ac 16.19-24 – mais il refusa de perdre courage et d’abandonner sa mission.
L’absence de résultats entraîne souvent l’utilisation de méthodes astucieuses. Il peut s’agir d’offres matérielles, d’appel aux sentiments, de récits émotifs, de promesses de prospérité…
La troisième tentation comporte une dilution ou une perversion du message même : par exemple, une absence de référence au jugement, à l’enfer, au prix à payer pour devenir disciple de Jésus-Christ…
La quatrième tentation affecte particulièrement les « plein-temps » ! Il s’agit de l’image de soi. L’on désire être accepté, apprécié, aimé, récompensé, suivi. Ou bien l’on préfère présenter sa propre interprétation du message biblique, son expérience, sa méthode pour une vie correcte…
L’apôtre Paul a résisté résolument à chacune de ces tentations.
Les points d’ancrage du prédicateur
Comment Paul a-t-il pu résister à ces tentations ? Grâce à trois points d’ancrage qu’il mentionne spécifiquement :
1. Il a une occupation privilégiée (v. 1) : II est « ministre de la nouvelle alliance » et il est bien conscient du grand honneur qui lui a été confié : d’avoir un ministère « glorieux » (voir chapitre précédent, versets 6 à 9). Il sait fort bien qu’il ne mérite pas une telle occupation, mais il se réjouit de la miséricorde de Dieu qui l’a sauvé d’une vie de rébellion contre Dieu et l’a appelé à être un héraut de l’Evangile (voir 1 Tm 1.12-17). Pas question d’abandon !
2. Il connaît la stratégie de l’adversaire (v. 4) : II s’agit du « Dieu de ce siècle » qui empêche de comprendre les Ecritures – qui séduit et attire par toutes sortes de promesses de bien-être.
Paul n’est pas surpris par le rejet de sa prédication, de la part de ceux qui sont aveuglés et entraînés sur le chemin de la destruction (lire Jn 12.31 ; Ep 2.2 ; 2 Co 3. 14-15 ; Mc 4.15 ; Mt 7.13).
3. Il est persuadé de la valeur de son message (v. 6) : C’est une lumière pénétrante qui éclaire le tréfonds de la pensée, dissipant les ténèbres de l’ignorance et de l’incompréhension, amenant à la connaissance de Jésus, à l’expérience qui lui fut accordée sur le chemin de Damas. Il s’agit d’une œuvre créatrice semblable à celle qui est rapportée en Gn 1.3. Paul prêche en sachant que Dieu accomplira son œuvre d’illumination dans les cœurs de certains de ses auditeurs.
La stratégie du prédicateur
II résulte des convictions de l’apôtre une stratégie bien définie :
– Rejetant l’utilisation de méthodes indignes, il s’engage dans une présentation claire et complète de la vérité, s’adressant à l‘intelligence de ses auditeurs de telle façon que personne ne peut mettre en question ses motivations.
– Il ne se met pas en avant, proclamant l’unique seigneurie de Christ – révélation parfaite de Dieu – crucifié, ressuscité, élevé en gloire. Puisqu’il appelle à une reconnaissance de cette seigneurie, il se considère simplement comme l’esclave de Jésus, et aussi de ceux à qui il annonce l’Evangile : il s’assujettit aux besoins de ses auditeurs (lire 1 Co2.2 ; Rm10.9-10 ; Rm 1.1 ; 1 Co 9.19-23).
Conclusion
Notre passage en fait suscite plus de questions qu’il n’en résout !
Pourquoi certaines personnes accueillent-elles la lumière de l’Evangile alors que d’autres la rejettent ?
II est évident que bien des facteurs affectent la proclamation du message. Leur interrelation et leur interaction nous échappent… Il y a la compétence du prédicateur, la liberté de l’auditeur, l’activité de Satan qui aveugle, la puissance intrinsèque de l’Evangile, l’œuvre persuasive du Saint-Esprit, et par-dessus tout, la volonté souveraine de Dieu. Quelle est notre interprétation des références néo-testamentaires concernant l’élection et la prédestination ? C’est en Dieu lui-même que se situe le mystère des réponses diverses accordées à la prédication (lire Rm 8.28-29 ; Ep 1.4-12 ; 1 Th 1.4-5).
Qu’en conclure pour ce qui concerne notre service ? … Une double responsabilité nous revient clairement :
– Une proclamation aussi claire et fidèle que possible de la bonne nouvelle.
– Une prière persévérante pour que Dieu nous assiste et nous bénisse dans notre évangélisation. Le reste est entre les mains de Dieu. Une évangélisation « à succès » ne se mesure pas par le nombre de conversions qui en résultent, mais par la fidélité de notre présentation de l’Evangile (lire Ep 6.19 ; Col 4.3-4 ; 1 Co 4.1-2).
J.B.
Note
1. : Traduit et adapté d’un article paru dans Partnership International Newsletter