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 main-tendue

par Thomas PETTY2

 

N’avez-vous jamais douté de Dieu ? N’avez-vous jamais douté que Jésus puisse tenir une promesse ?

 

 

Avant de répondre trop vite, examinons le mot DOUTER ! Il vient du latin dubitare, et signifie simplement deux, ou double. Mais allons plus loin : nous connaissons tous le mot CROIRE, qui veut dire que nous avons un seul avis quant à la véracité d’un fait. Si nous ne croyons pas, si nous refusons de croire, là aussi nous n’avons qu’un seul avis… nous ne croyons pas !

 

Douter nous entraîne dans une troisième situation possible : celle de croire et de ne pas croire tout à la fois, de vaciller entre deux opinions, d’avoir deux avis contradictoires ou parallèles.

 

Un proverbe chinois illustre bien cette situation : « avoir un pied dans deux bateaux ». Les Indiens du Pérou parlent d’avoir « deux pensées » sur un sujet. Et selon Martin Luther, l’art de douter est facile, car c’est une capacité qui est innée en nous. Seuls Dieu et quelques fous n’ont pas de doutes ! En France nous avons un proverbe qui dit : « Celui qui ne sait rien ne doute de rien ». Les Grecs déclarent que « les sages sont enclins au doute ». Et un autre proverbe chinois propose que « les grands doutes sont accompagnés d’une grande compréhension ; les petites choses, d’une petite compréhension ».

 

Le doute est donc bien humain et bien universel ; et d’autre part, certains doutes semblent positifs.

 

Mais le doute peut avoir de grandes conséquences dans notre vie chrétienne. Le doute touche notre confiance et notre loyauté envers Dieu : pouvons-nous faire confiance à Dieu ? Sommes-nous sûrs de Lui ? Faisons-nous assez confiance au Seigneur pour nous appuyer entièrement sur Lui, et faisons-nous assez confiance à Christ pour jouir pleinement de sa présence ?

 

Dans la vie de Thomas, nous voyons comment le doute a affecté sa marche avec Jésus. Thomas a dû faire face à ce problème et le régler.

 

Que savons-nous de lui ? Thomas en araméen, Didyme en Grec, signifie jumeau ; mais nous n’en savons pas plus. Dans les évangiles synoptiques, il est simplement mentionné dans la liste des apôtres. Selon Jean 21, nous pouvons conclure qu’il était probablement pêcheur, car il péchait avec les disciples après la résurrection du Seigneur. Jean rapporte trois événements de la vie de Thomas qui éclairent une facette de sa personnalité : nous découvrons une personne qui s’attend toujours au pire et qui ne peut pas croire au bien lorsque celui-ci se réalise…

 

Relevons trois attitudes de sa part qui peuvent nous aider dans nos propres doutes :

 

 

1. CONSECRATION, ENGAGEMENT

 

Dans le 8ème chapitre de son Evangile, Jean rapporte que l’opposition à Jésus est devenue très violente ; ses ennemis ont essayé de le lapider ; aussi Jésus se rend-il dans un territoire plus « sûr ». Il y reçoit la nouvelle de la maladie de son ami Lazare, puis de sa mort. Le problème est que Béthanie se trouve dans la zone dangereuse.

 

En Jn 11.8, les disciples laissent bien entendre ce qu’ils pensent du Maître : il perd tout simplement le sens des réalités ! Curieusement, c’est Thomas qui se met du côté de Jésus : Allons avec Lui pour mourir avec Lui. S’il y va, nous irons aussi ! (Jn 11.16)

 

Thomas s’est consacré à Jésus ; il a un engagement envers Lui, il a un certain courage pour le suivre quoi qu’il lui en coûte. Essayons de comprendre ce qui se passait en lui : il a le sentiment que Jésus est sur le point de commettre la plus grave erreur de sa vie, mais, dit-il, « nous avons fait un choix, nous allons le suivre coûte que coûte, même si le prix est notre vie même ». Mais le doute qui mine Thomas le rend pessimiste.

 

L’engagement de suivre Jésus-Christ sans une confiance absolue en Lui fait de Thomas un disciple à l’esprit négatif, perdu d’avance ; voilà ce que devient Thomas à cause de son doute ! Voilà ce que nous sommes si nous vivons dans le doute. Le doute, le manque de confiance, sont à la racine du négativisme et du pessimisme dans la vie chrétienne, et dans l’église.

 

Pouvons-nous illustrer cette vérité ? Vous avez été blessé par quelqu’un, et Jésus vous dit de prier pour lui. « D’accord Seigneur, je le ferai, mais je sais d’avance qu’il me fera encore mal, et qu’il profitera de moi… Pourtant je prierai pour lui. » Toutefois dans ces conditions, c’est avec une attitude négative que vous le ferez !

 

 

2. CONCENTRATION SUR L’ESSENTIEL

 

Revenons à Thomas. Maigre ses doutes, il n’a pas renié son engagement : « Je doute de ce que Jésus fait, mais je sais qui II est ; j’ai fait mon choix, je ne chancellerai pas » (Jn 14.5).

 

Thomas parle peut-être pour tous. Les disciples sont dans la confusion, ils ne peuvent supporter l’idée que Jésus aille délibérément, ou sans en être vraiment conscient, vers le danger et la mort. Cela ne cadre pas avec leur raisonnement.

 

C’est peut-être ce qu’a voulu exprimer Léonard de Vinci en peignant son célèbre tableau de la Sainte Cène : on y voit Thomas, très près de Jésus, son doigt en l’air et la bouche ouverte. Il semble dire : « Mais Seigneur, attends ; je ne comprends pas, réponds à ma question ! »

 

Jésus leur annonce qu’il va les quitter. Thomas interroge encore :

 

« Mais comment connaître le chemin ? »

 

Réponse du Seigneur :

 

– « Thomas, où étais-tu donc pendant toutes ces années ? La chose la plus importante est de me connaître. »

 

Le doute avait amené Thomas à perdre de vue l’essentiel.

 

 

3. COMMUNION

 

Thomas était absent lorsque Jésus s’était présenté au milieu de ses disciples (Jean 20.24). Nous pouvons supposer qu’il avait peur. Son monde s’était écroulé…

 

Que faisons-nous lorsque tout s’écroule autour de nous ?

 

Notre premier réflexe souvent, c’est de nous replier sur nous-mêmes ; comme Thomas, nous ne voulons pas être avec les autres, nous avons envie de les blâmer, c’est de leur faute !

 

Considérons en Jn 20 tout ce que Thomas a manqué :

 

v. 25 : de revoir de Jésus,

 

v. 19 : la paix (« Détendez-vous ! je suis de retour, ne craignez pas ! »),

 

v. 20 : la joie,

 

v. 26 : une semaine d’attente joyeuse avec les autres disciples…

 

Comme les sentiments de Thomas sont en contraste avec ceux des autres disciples ! Peur, crainte, abattement dans l’isolement, retrait et solitude.

 

Mais Thomas retourne vers le groupe des disciples ; même dans son éloignement, il est resté en communion avec eux, et surtout attaché au Seigneur. Sa confession le prouve (v. 28) : « Mon Seigneur et mon Dieu ! »

 

Lorsque Thomas voit ce que la croix a fait à Jésus, lorsqu’il voit ses blessures, il est convaincu !

 

Lorsque nous regardons les mains de Christ, nous voyons jusqu’où est allé son amour pour nous. Lorsque je vois cet amour, je peux, je veux lui faire confiance.

 

L’histoire suivante peut illustrer cela : un incendie ravage un immeuble et provoque la mort de toute une famille sauf un jeune garçon repéré à une fenêtre, accessible seulement par un tuyau extérieur encore épargné par les flammes, mais brûlant.

 

Un étranger se précipite, atteint l’enfant et le redescend en se servant du tuyau, puis disparaît dans la foule.

 

Quelque temps plus tard, les autorités de la ville doivent décider de la prise en charge de l’enfant privé de toute sa famille : un fermier se présente et propose de l’accueillir n’ayant pas d’enfants, il en fera son héritier ! Interrogé, l’enfant décline cette offre alléchante. L’homme le plus riche de la ville se présente ensuite, pour offrir à l’enfant une prise en charge totale avec tous les avantages rendus possibles par sa fortune. Consulté à nouveau, l’enfant refuse, au grand étonnement de l’assistance.

 

Arrive alors un étranger qui propose de prendre en charge l’enfant en montrant simplement ses mains meurtries par l’escalade qui avait permis le sauvetage. L’enfant, le reconnaissant, demande à lui être confié : « S’il a fait cela pour moi, je sais que je peux lui faire confiance totalement ; il fera pour moi tout ce qu’il a promis ».

 

Si jamais nous doutons, regardons les mains de Jésus, et faisons notre choix !

 

T.P.


 

NOTES

 

1.  Message donné au Congrès de l’Association d’Eglises de Professants Francophones le 23 septembre 1996.

 

2.  Thomas Petty est directeur de l’Institut Biblique Européen (Lamorlaye).