Quelle Apologétique pour nous, aujourd’hui ?
Par Charles Leroux
A qui s’adresse l’apologétique ?1
Si on suit l’exhortation de Pierre (1 P 3.15), c’est tout chrétien qui devrait être prêt à rendre compte de sa foi, de son espérance. Il ne s’agit certainement pas d’avoir une explication à toute question, mais au moins une réponse et « Je ne sais pas mais j’entends bien ta question » est déjà une réponse qui témoigne d’une écoute, d’une humilité dans la foi et aussi d’une ferme confiance dans la solidité de ce en quoi nous croyons au-delà des questions qui se posent.
Une telle réponse n’est pas une tactique de réponse et si c’est le cas elle deviendra une bien pauvre tactique. Une telle réponse ne doit pas nous satisfaire au final car nous sommes redevables à nos contemporains d’explications sur la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ.
Il y a donc une exigence de formation dans l’Eglise. Les croyants comme témoins apologètes de leur foi doivent apprendre à répondre. Les responsables de l’Eglise ont un devoir de formation. Dans cette formation, nous voyons au moins deux champs : d’une part l’apprentissage au dialogue, d’autre part l’approfondissement des questions qui se posent.
L’apprentissage au dialogue
Qu’est-ce qu’une question ? Une question est-elle toujours demandeuse d’explication ? N’est-elle pas parfois et même souvent une réfutation, une manière d’exprimer son désaccord. Il y a les questions que l’on entend et celles qui ne se font pas entendre. Peut-on aider à se poser des questions ? Nous quittons peut-être le champ de 1 Pierre 3.15 où il est question de répondre à ceux qui s’opposent à notre foi, mais pas celui de 1 Pierre 2.9 qui place le témoignage à Dieu et à ses oeuvres au centre du ministère de chaque croyant. Témoigner de notre foi, c’est aussi la rendre intelligible et surtout, pas déraisonnable […]
Mais attention de ne pas nous positionner en donneur de leçon et en détenteur de la vérité. Humilité, douceur et respect doivent nous caractériser. Pierre nous dit aussi de répondre avec une bonne conscience.
Quelques limites
L’apologétique a souvent été perçue comme un outil au service de l’évangélisation. Si par évangélisation, nous comprenons ce devoir de témoignage que Dieu nous confie (1 Pi 2.9 ; Ac 2.8) alors, oui, l’apologétique se doit de rendre explicite, cohérente et claire, la Bonne Nouvelle que Dieu nous confie et qu’il adresse à tous les hommes. Nous sommes redevables auprès d’eux d’explications, ce sont les termes de 1 Pierre 3.15 « … devant quiconque vous demande raison ». Si cela vaut pour ceux qui nous agressent dans notre foi à cause de notre témoignage, cela vaudra à bien plus forte raison pour ceux qui y sont ouverts.
Ce que nous leur devons, c’est une défense claire et cohérente de l’espérance qui nous anime. La foi chrétienne n’est pas un saut dans le vide, mais la réponse raisonnable au message de salut que le vrai Dieu, créateur de ce monde, adresse à tous les hommes. Le titre de l’excellent livre d’Alister MAC GRATH, « Jeter des ponts »3 me semble remarquablement bien résumer l’effort de l’apologétique : une main tendue auprès de nos contemporains pour les aider à mieux entendre la bonne nouvelle de Jésus-Christ.
Conclusion
Cette juste défense de la foi ne doit pas être l’apanage de quelques spécialistes, mais une culture d’église qui permet à tout un chacun, de l’évangéliste à plein temps aux frères et soeurs engagés sur leurs différents lieux de vie, de mieux témoigner à nos contemporains de notre espérance.
Cette juste défense de la foi passe par une meilleure compréhension des questions qui se posent, et des faux raisonnements qui se sont imposés, par un art du dialogue et de l’écoute, par une attention à ce qui rend les oreilles plus attentives à cette bonne nouvelle. C’est l’art de jeter des ponts sur lesquels ceux qui le souhaitent pourront s’engager à la rencontre du Dieu d’amour4.
C.L
NOTES
1. Extrait d’une conférence donnée à la Journée Apologétique à Grenoble en mai 2008.
2. Charles LEROUX, physicien et responsable d’Eglise
3. Alister MAC GRATH, Jeter des ponts, l’art de défendre la foi chrétienne, Collection Sentier, Editions La Clairière, Québec, 1999.
4. Nous paraphrasons avec cette dernière phrase, les titres du livre d’Alister MAC GRATH déjà cité et celui d’un court livre de l’évangéliste Ulrich PARZANY, A la découverte du Dieu d’amour, édité par 7id, paru à l’occasion de la campagne Pro Christ 2000.