Quelle église pour demain ? (1ère partie)

 chandelier

par Frank HORTON

 

 

I. Le Chef de l’Église (Apoc. 1.4-20)

 

Dans l’histoire de l’Eglise, il y a une continuité, des constantes qui nous permettent de revenir à l’Écriture, à ces textes inspirés du 1er siècle, qui sont toujours actuels et s’appliquent à notre situation présente. Je crois que les problèmes auxquels l’Église est confrontée sont toujours les mêmes, et leur solution est toujours la même. Et j’ai pensé qu’il ne serait pas indiqué de traiter le thème : « Quelle Église pour demain ? » sans commencer par le vrai point de départ, c’est-à-dire la Personne de Celui qui est le Fondateur de l’Église, notre Seigneur Jésus-Christ, qui a dit lui-même : « Je bâtirai mon Église, et les portes de l’enfer ne prévaudront pas contre elle. »

 


 

Je propose donc qu’avant d’examiner ensemble quelques-unes des lettres aux sept Églises d’Asie faisant l’objet des chapitres 2 et 3 de l’Apocalypse, nous méditions, au chapitre premier, sur la première des christophanies, c’est-à-dire des quatre visions du Christ glorifié qu’a eues l’apôtre Jean, car tout dépend, pour nous comme pour Jean, de notre vision du Seigneur et de notre relation avec Lui.

 

L’apôtre Jean nous dit quelque chose de profondément émouvant au premier chapitre de son Évangile, où nous lisons (Jean 1 v. 14) : « la Parole a été faite chair, elle a planté sa tente au milieu de nous, et nous avons contemplé sa gloire, la gloire du Fils unique venu du Père ». Témoignage bouleversant de celui qui était l’ami intime du Seigneur, celui des disciples qui vivait le plus près de Jésus. Et s’il y avait un homme capable de déceler la moindre faille, la moindre imperfection, le moindre mouvement d’irritation ou de découragement chez le Seigneur, c’était l’apôtre Jean. Et c’est ce disciple qui, plusieurs dizaines d’années plus tard, alors qu’il était exilé dans l’île de Patmos, a eu cette vision merveilleuse du Christ, non d’un Christ incarné, mais d’un Christ glorifié.

 

Nous n’allons pas nous arrêter sur les différents titres donnés au Seigneur Jésus dans le chapitre premier de l’Apocalypse. Je vous encourage à les étudier à la lumière de l’Ancien Testament. D’ailleurs l’Apocalypse doit être comprise à la lumière d’un symbolisme qui vient, d’abord bien sûr du livre de Daniel, mais aussi de bien d’autres livres de l’Ancien Testament.

 

Dans cette première vision, qui le prépare à écrire les lettres qu’il devra adresser aux sept Églises d’Asie, Jean voit « quelqu’un qui ressemblait à un fils d’homme », rappel du livre de Daniel (7. 13). Il tient les sept étoiles et se déplace au milieu des sept chandeliers. Les sept étoiles représentent les Églises d’Asie, dont Éphèse était sans doute la première, l’Église mère. En effet l’apôtre Paul, dans sa stratégie missionnaire, allait toujours vers le centre urbain le plus important, car il pensait que c’était cette ville qui avait la clé de l’évangélisation de toute une région. Il est donc pro-bable que les six autres Églises étaient les « filles » d’Éphèse. L’apôtre Jean, qui connaissait toutes ces Églises pour avoir demeuré à Éphèse, aurait pu être découragé, maintenant qu’il était exilé à Patmos et ne pouvait plus leur apporter son ministère apostolique.

 

Mais le Seigneur lui dit en substance, en se présentant avec les sept étoiles dans sa main droite, que, bien qu’il ne soit pas là, les Églises ne sont pas abandonnées. Et cela n’est-il pas vrai encore de nos jours ? Que de fois nous entendons parler de l’expulsion de missionnaires de tel ou tel pays. Je pense, par exemple, à la Chine continentale, d’où tous les missionnaires sont partis en 1951. Et pourtant, les chiffres qu’on nous donne sont stupéfiants : on a parlé de 50 millions de chrétiens en Chine communiste à l’heure actuelle ! En Angola, d’où les missionnaires ont été chassés par le régime marxiste en 1975, certaines Églises explosent littéralement et sont passées depuis de quelques milliers de membres à plusieurs dizaines de milliers. Non, elles n’ont pas été abandonnées par le Seigneur et ne le seront jamais.

 

Jésus marche au milieu des chandeliers, qui représentent les Églises. Nous avons là, je crois, une image de sa présence. Celui qui est glorifié et tout puissant, à qui le Père a donné toute autorité et toute puissance, est là au milieu des Églises, aussi faibles, infidèles et misérables soient-elles. Il est là pour surveiller, pour exhorter, pour avertir, pour juger et pour accorder aux Églises toutes les ressources dont elles ont besoin pour vivre et pour vaincre. Cela devrait déjà, d’emblée, nous encourager, car je sais que vivre dans une église, et surtout s’y engager, n’est pas chose facile !

 

Jésus se présente à Jean. Nous avons ici une description où l’apôtre fait appel à notre imagination poétique. Laissons-la agir, mais d’une manière sobre et dans la dépendance du Saint-Esprit, qui est là pour glorifier le Seigneur devant nos yeux et dans nos coeurs.

 

Que voyons-nous dans ces différents éléments de description ? Nous lisons d’abord, au v. 13, qu’il était vêtu d’une longue robe et portait une ceinture d’or sur la poitrine. Nous nous souvenons des habits que le Seigneur a portés sur la terre pendant son incarnation. D’abord les bleus de travail, tandis que ses mains étaient durcies par l’apprentissage dans l’atelier de charpentier de Joseph ; et c’est ainsi qu’il a ennobli le travail manuel. Puis, au chapitre 13 de l’Évangile de Jean, l’un des textes qui me bouleverse le plus, nous voyons le Seigneur enlever ses vêtements pour ne garder que l’habit d’un serviteur.

 

Et après avoir, selon Luc 22, fait des reproches à ses disciples qui voulaient savoir lequel serait le plus grand, II leur montre, par son exemple, le chemin à suivre et devient le serviteur de ses propres disciples, y compris de celui qui allait le renier et même de celui qui allait le trahir ! Puis dans Jean 19, au verset 23, lorsque les soldats partagent ses vêtements, il est parlé de cette tunique sans couture qui nous rappelle certains textes de l’Ancien Testament et les instructions données pour l’habit du souverain sacrificateur. Sur la croix, on a enlevé à notre Seigneur tous ses vêtements, tout ce qui rappelait sa dignité d’homme. Il est devenu un objet de mépris et de moquerie devant ses ennemis.

 

Dans la vision de Jean, Jésus était donc vêtu d’une longue robe, que je crois blanche bien que le texte ne le dise pas, mais l’Ancien Testament me porte à le croire. Il a une ceinture d’or sur la poitrine. Je vois dans ces vêtements la robe du souverain sacrificateur dont il est question dans Exode 28 en particulier. Celui qui est descendu sur la terre et s’est donné pour nous est maintenant au ciel et continue son ministère de souverain sacrificateur dans l’intercession. Il est Celui qui nous représente auprès du Père, qui intercède, qui prie pour nous.

 

L’Écriture ne dit pas ce qu’il demande au Père, mais il nous suffit de savoir qu’il est là, notre représentant, et cela sur la base de son propre sacrifice parfait. Il met à la disposition de l’Église toutes les ressources dont elle a besoin. Il nous rappelle aussi qu’à son exemple nous sommes appelés à servir. La tâche du souverain sacrificateur est essentiellement une tâche de service, et la nôtre doit l’être aussi. Méfions-nous de toute ambition dans l’Église, du complexe du pouvoir tellement répandu même dans les milieux évangéliques.

 

Dans la contemplation de la robe que porte le Seigneur, notre désir de monter mourra, notre penchant à être servi disparaîtra, et nous désirerons ardemment servir à notre tour.

 

Cette robe, c’est aussi la robe royale, celle que porte le Roi des rois, Lui qui a reçu un sacerdoce royal unique en son genre, selon Melchisédek. Jean, voyant Celui qui est debout devant lui, va tomber à ses pieds comme mort, reconnaissant que Jésus est debout pour régner. Si je reconnais en Jésus portant cette robe mon Roi et mon Seigneur, je mettrai à ses pieds mon désir d’indépendance, ma volonté propre, et je lui dirai : Seigneur, je comprends que c’est ta volonté qui est bonne, agréable et parfaite. Je veux la connaître, l’aimer, la faire mienne et marcher dans cette voie.

 

Nous passons au verset 14 où nous lisons : « Sa tête et ses cheveux étaient blancs comme de la laine, comme de la neige ». Nous avons là encore un écho de Daniel (7.9), où les cheveux de l’Ancien des jours sont blancs comme de la laine. Jean veut nous rappeler ici que c’est Jésus lui-même qui est l’Ancien des jours, comme le souligne aussi un autre verset de l’Apocalypse : « Celui qui était, qui est et qui vient », par lequel l’apôtre pour ainsi dire, traduit en grec de nom de Yahweh, l’Éternel, Celui qui n’a ni commencement ni fin, Celui dont l’origine remonte aux jours d’éternité, comme dit Michée. Jésus comme Homme venu sur terre est mort à l’âge de 33 ans, mais II vient de l’éternité et appartient à l’éternité.

 

L’oeuvre qu’il est en train d’accomplir dans l’Église, dans vos assemblées comme dans la mienne, a une portée éternelle. D’où son importance, et l’importance de l’église locale. C’est par l’Église que Dieu entend accomplir son oeuvre sur la terre. Toutes les oeuvres interecclésiastiques qui existent (Ligue, GBU, etc.) ne peuvent que compléter le ministère des églises, mais c’est l’Église qui est normative dans la pensée de Dieu. Et c’est pourquoi, dans la formation que nous donnons à Emmaüs, nous mettons l’accent sur l’église locale.

 

Nous travaillons avec Christ en vue de l’éternité. Aussi pouvons-nous lui apporter nos sujets d’inquiétude et de souffrance. Peut-être vous arrive-t-il, comme à moi, de vous réveiller en pleine nuit en pensant aux problèmes de votre assemblée et de dire au Seigneur : Seigneur, où va mon église ? Nous pouvons bien lui apporter nos angoisses et compter sur Lui, car II travaille en vue de l’éternité.

 

Mais les cheveux blancs ne parlent pas seulement de vieillesse. Oui, le Seigneur Jésus est l’Ancien des jours. Les cheveux blancs peuvent être aussi le résultat de la souffrance et du chagrin.

 

Jésus, c’est l’Homme de douleur, et ses cheveux blancs, Lui qui est mort jeune, ne seraient-ils pas consécutifs aux souffrances qu’il a connues ? Il a aussi porté nos souffrances et nos douleurs à la croix, et s’il est notre souverain sacrificateur aujourd’hui, c’est qu’il est sensible à toutes nos circonstances. Il connaît nos tentations, nos épreuves, nos faiblesses, nos luttes intérieures. Il les porte avec nous, II n’est pas insensible à ces choses, parce qu’il a connu tout cela. Nous pouvons tout lui apporter, laisser tomber nos masques et cesser d’essayer de porter les fardeaux tout seuls. L’amertume, la pitié de soi, tout cela peut et doit disparaître, pour faire place à un coeur en repos, libéré, guéri intérieurement, parce que nous connaissons Quelqu’un qui sait ce que c’est que la sympathie et la compassion.

 

Le troisième aspect de Christ qui nous est décrit concerne ses yeux, qui « étaient comme une flamme de feu », des yeux qui sondent jusqu’au plus intime de nos coeurs. Il connaît nos secrets, nos aspirations, nos fantasmes, nos pensées non contrôlées qui divaguent dans des directions que nous préférons cacher. Nous sommes parfois des énigmes pour nous-mêmes, il y a des choses que nous ne sondons pas, mais Jésus nous connaît parfaitement, II sait tout cela. Il connaît nos désirs les plus nobles comme les plus mauvais, rien ne lui est caché. De plus, II est là pour purifier nos consciences, pour nous transformer à son image et pour nous embraser d’amour pour Lui.

 

L’une des histoires de l’Ancien Testament les plus réjouissantes est l’histoire de Jacob. Quel chemin parcouru entre la première rencontre à Béthel avec l’Éternel (Genèse 28) et celle qu’il eut quelque 20 ans plus tard, après son expérience amère auprès de Laban ! Cet homme, avec tout ce qu’il avait de méprisable, ce supplanteur, ce calculateur, est devenu un prince avec Dieu ! Dieu n’a jamais désespéré, II ne l’a pas abandonné. Remarquez, cependant, que lors de la première rencontre, à Béthel, Dieu n’a posé aucune condition, II n’a fait que des promesses.

 

Jésus est celui qui nous connaît et s’occupe de tous nos besoins. Il est capable de pourvoir à tout et de prendre soin de nous. Comme Jacob, apprenons à abandonner nos propres solutions, à laisser tomber notre confiance en nous-mêmes, car Celui qui nous connaît et prend soin de nous, qui est à nos côtés pour nous sonder, mais aussi pour nous aider, peut nous donner assurance, confiance, transparence et sagesse nouvelles.

 

J’aimerais m’arrêter un instant sur la voix du Seigneur (v. 15) et sur sa main (v. 16 et 17). « Sa voix était comme le bruit de grandes eaux ». Je ne sais pas si vous vous êtes tenus près d’une grande cascade, mais lorsqu’on se trouve à proximité d’une masse énorme d’eau qui tombe dans le vide, il est impossible d’avoir une conversation avec son voi-sin. Cette voix représente la puissance et l’autorité du Seigneur. C’est la voix du Créateur, qui appelle les choses à l’existence. C’est aussi la voix qui appelle les hommes aux salut. Combien d’entre nous pourraient rendre témoignage à la puissance de cette voix qui les a atteints alors qu’ils étaient très loin du Seigneur ! C’est la voix du Sauveur, mais c’est aussi la voix du Juge, de Celui à qui le Père a confié la tâche, non seulement de ressusciter les morts, mais aussi de juger. Les hommes auront affaire à un Juge juste et équitable, qui a connu la condition humaine, mais saura juger avec autorité.

 

Nous sommes invités à nous mettre à son écoute. L’apôtre Pierre parlait beaucoup, mais il dut apprendre à se taire lorsque la voix du Père se fit entendre sur la sainte montagne : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j’ai mis toute mon affection ; écoutez-le. »

 

Au verset 16 nous sommes appelés à contempler la main de Jésus, cette main qui tient les 7 étoiles. Elle nous parle de l’autorité de Celui qui maintient tout l’Univers, qui nous tient également, car nous sommes dans sa main, et sa main est dans celle du Père. C’est là la double garantie de notre sécurité éternelle. Nous sommes dans des mains sûres, même si les choses ici-bas doivent aller de mal en pis. Cela nous invite à ne plus choisir notre propre voie, à ne plus chercher à nous débrouiller tout seuls, à ne plus vivre dans l’indépendance.

 

La Bible ne nous compare pas à des aigles ou à des lions, mais à des brebis. Et nous avons un Berger, un bon Berger. Nous ne savons pas ce que nous réserve l’avenir, mais nous savons qui en détient la clé, et nous sommes dans sa main. Main qui – chose étonnante – est tendrement posée sur Jean, au verset 17

 

Si j’ai voulu m’arrêter aussi longtemps sur ce texte, avant d’aborder le sujet « Quelle Église pour demain ? », c’est parce que je suis persuadé que l’avenir de l’Église dépend essentiellement d’une chose, sa relation avec le Seigneur Jésus-Christ. Pouvez-vous dire avec moi : « J’aime Jésus ! » ? Amen.

 

F.H.

 

Message apporté à la Convention de Pentecôte 1987 à l’Hermon – Le Chambon s/Lignon (43).