Inspiration et autorité de la Bible
2° partie 1
par Frank Horton
IV. CONSIDERATIONS PRATIQUES
C’est précisément parce que l’Ecriture Sainte est – directement – la Parole de Dieu, que la responsabilité de l’Eglise, des chrétiens et des hommes qui la lisent et l’écoutent est toujours, inévitablement, engagée. C’est précisément parce que l’Ecriture Sainte est la Parole de Dieu, avec laquelle nous sommes sans cesse confrontés, et à laquelle il nous est impossible de nous soustraire, qu’aucune échappatoire, aucune évasion, aucun faux prétexte ne nous sont permis et que Dieu demande, réclame, souverainement, la réponse de la foi et de l’obéissance.
Avec l’Ecriture nous avons à faire avec la Révélation même de Dieu qui exige notre conversion et notre soumission, nous avons à faire avec la proclamation du grand oeuvre salvateur (sic) de Dieu qui s’est accompli dans l’histoire depuis le commencement jusqu’à Jésus-Christ. Le Seigneur de l’Ecriture et l’Ecriture du Seigneur sont là, ensemble, devant nous, aussi longtemps qu’on peut dire aujourd’hui, dans ces « derniers temps » où nous sommes. Avec leur pleine et infaillible autorité. (P. Courthial, p. 35.)
Lecture
Si, au plus profond de nos convictions, nous nous laissons saisir par le fait que Dieu nous a parlé – et nous parle encore – par sa Parole, et que cette Parole est revêtue de toute son autorité, alors notre lecture en sera profondément marquée… Nous nous en approcherons avec respect, dans un esprit d’humilité, de dépendance, de soumission et d’obéissance, assurés de l’assistance du Saint-Esprit pour nous conduire dans une compréhension, dans une acceptation, dans une assimilation de la vérité d’en-Haut, et confiants que ce même Saint-Esprit appliquera la Parole à nos vies pour nous éclairer, nous instruire dans la justice, nous transformer, et nous conduire dans le chemin de l’obéissance.
Dans cet esprit de dépendance nous utiliserons les facultés que le Créateur nous a données, d’intelligence, de raisonnement, de recherche, de comparaison, d’analyse, de synthèse et de méditation, pour que cette Parole s’incarne en nous et devienne nôtre. Cette approche nous protégera de toutes les fausses lectures – mystique, illuministe, subjective, sentimentale, etc. – comme des tentations de faire de « l’exégèse », de construire des doctrines sur des bouts de versets, ou d’écarter ce qui n’est pas à notre goût.
Ainsi donc, mes frères, cet Esprit saint, que l’on veut exalter en excluant l’autorité de l’Ecriture, atteste lui-même, au contraire cette divine autorité des oracles de Dieu.
On a dit récemment que, en cessant de reconnaître la Bible pour une autorité, on sera amené à rechercher plus ardemment le Saint-Esprit ; que l’Ecriture et l’Esprit s’excluent ; que là où est l’Ecriture, l’Esprit disparaît. Ces paroles sont étranges, mes frères ; elles seraient énormes de danger, si elles n’étaient énormes d’erreur. Le Saint-Esprit est communiqué à l’homme, mais par le canal des Ecritures. La Parole nous déclare que les saintes Ecritures sauvent par la foi en Jésus-Christ, que la foi vient de ce qu’on entend, et que l’on entend par le moyen de la Parole de Dieu...
Non, il n’est pas vrai que là où est l’Ecriture, l’Esprit disparaît. Tout au contraire, rien n’est uni aussi intimement que l’Esprit et l’Ecriture. L’Ecriture fait trouver le Saint-Esprit ; le Saint-Esprit donne la foi à l’Ecriture. Ce n’est pas l’autorité de l’Eglise qui nous donne la foi à la Parole, comme le prétendent les papes ; ce ne sont pas certains principes de la raison, comme le prétendent quelques théologiens protestants; c’est Dieu qui crée lui-même cette foi en nous par sa Parole et par son Saint-Esprit. Nous avons de la divinité de l’Ecriture une démonstration immédiate, provenant de la vie qui a été manifestée et qui est la lumière des hommes. Notre foi à la Parole de Dieu n’est pas une foi simplement historique, comme quelques-uns se l’imaginent, ni une foi simplement philosophique, comme d’autres le pensent ; non, c’est une foi divine, une foi qui a ainsi une certitude, une fermeté intime élevée, inébranlable, comme Dieu qui en est l’auteur. (J.-H. Merle d’Aubigné, p. 62ss.)
Prière
Dans la mesure où nous nous laissons saisir par l’autorité de la Parole de Dieu et, derrière elle, par l’autorité de Dieu lui-même, notre vie de prière en sera transformée. Un exemple saisissant de cela est la prière de Daniel au 9e chapitre de son livre. Je vois au moins trois liens qui rattachent cette prière aux textes de l’Ancien Testament que Daniel avait (ou aurait) lus :
1. Tout d’abord, c’est la lecture de ces textes qui pousse Daniel à prier, et qui inspire sa prière. Il nomme lui-même les prophéties de Jérémie (ch. 25, 29) au sujet des 70 ans d’exil qui touchent maintenant à leur fin. Il semble être au courant des promesses et des menaces de Dieu dans Deutéronome 27 et 28.
Peut-être connaît-il aussi la complainte de Dieu (Ezéchiel), qui cherche un homme pour se lever et se mettre à la brèche, et qui n’en trouve pas. Toujours est-il que, bouleversé par ses lectures, il prend le deuil et cherche la face de l’Eternel. Sa prière, déclenchée par la méditation de l’Ecriture, sera aussi instruite et orientée par elle, pour être conforme à la volonté du Seigneur. Cette précaution gardera Daniel de prier à la légère et de formuler des requêtes superficielles, égocentriques.
2. Deuxièmement, dans un élan magnifique de solidarité avec le peuple apostat de Dieu, dont il confesse les péchés comme s’ils étaient les siens propres, il reconnaît surtout, à plusieurs reprises, le point de départ de son dérapage, savoir, qu’Israël n’avait pas écouté la Parole de Dieu, ne l’avait pas prise au sérieux, mais s’en était détourné (v. 6,10,11,12,13). Ai-je besoin de faire le parallèle avec nos églises aujourd’hui ?
3. Enfin, Daniel fonde ses supplications en faveur du peuple et pour la ville de Jérusalem sur Dieu lui-même et sur ses attributs : ce Dieu grand, redoutable, fidèle pour bénir comme pour châtier, miséricordieux pour pardonner, puissant pour délivrer, juste dans tous ses actes. Mais où a-t-il pu forger une conception si majestueuse de Dieu, sinon dans une méditation approfondie de sa Parole ?
Bref, prier dans la soumission à l’autorité de Dieu, c’est apprendre à vouloir ce que Dieu veut – à la lumière de sa Parole ! – en invoquant les raisons qui l’honorent et le glorifient.
Foi
Vivre sous le signe de l’autorité de la Parole de Dieu et, derrière elle, de l’autorité de Dieu lui-même, c’est exercer une foi libératrice qui, tout en nous rappelant notre petitesse et nos limitations, nous préservera pourtant du pessimisme. Car cette foi aura pour objet le Dieu de l’Ecriture, tout-puissant et souverain, qui n’arrêtera pas d’accomplir son oeuvre de grâce jusqu’à son achèvement, qu’il s’agisse de nos vies individuelles, de nos églises, ou des nations et du monde. Car cette foi en Dieu, nourrie et fortifiée par sa Parole, cultivera en nous un weltan-schauung (conception globale de la vie et du monde) authentique, réaliste, saine et vigoureuse parce que conforme à la pensée et aux desseins de Dieu.
Obéissance
On parle beaucoup de réveil à l’heure actuelle, à tel point que ce mot est devenu un piège, surtout s’il est détaché d’un retour à la Parole de Dieu et d’une redécouverte de ses exigences. D’ailleurs, où trouvez-vous la notion du réveil dans le Nouveau Testament ? Ne devrions-nous pas revenir aux priorités véritables de la vie chrétienne telles que les apôtres les voyaient ? Nous constaterons alors que Paul, par exemple, insiste toujours à nouveau sur la consécration, la soumission à l’autorité du Seigneur, l’obéissance, et la croissance vers la maturité. Car il sait que la crédibilité de l’Eglise, devant le monde, est à ce prix, qu’elle dépend moins des « signes et prodiges » que de vie qualitativement différentes, transformées par la puissance du Saint-Esprit.
Obéissance. Mes frères, gardez les saintes Ecritures et surtout obéissez aux saintes Ecritures. Que votre obéissance à la Parole de Dieu soit absolue et vivante. Ce n ‘est pas seulement en théorie que l’on peut renverser l’autorité de la Parole de Dieu ; on le peut aussi bien en pratique ; et nous tous, hélas ! nous le faisons chaque jour. Oui, je m’accuse moi-même et je vous accuse comme prenant quelque part à cette funeste erreur… Savez-vous ce qui vaincra cette erreur qui menace d’envahir les Eglises ? Ce ne seront pas les réfutations des docteurs, mais ce sera la fidélité des disciples, par la vertu de Dieu. (Ibid., p. 71s.)
Témoignage dans l’Eglise
Le pasteur James M. Boice, connu aux Etats-Unis pour son ministère d’enseignement biblique systématique, dans son église à Philadelphie et à la radio, constate la quasi-disparition de cette forme de prédication :
Quiconque examine sérieusement l’état de la prédication en notre vingtième siècle doit constater une contradiction étrange. D’une part, on reconnaît partout qu’il y a un grand besoin de bonne prédication, qui est généralement définie comme l’exposition de la Bible. Et cependant, d’autre part, rarement a-t-on vu si peu de bonne exposition biblique… (Les fidèles) savent ce qu’ils veulent : un pasteur dont le but principal sera d’enseigner la Bible avec fidélité, semaine après semaine, et aussi d’incorporer ce qu’il enseigne dans sa vie personnelle. Mais des pasteurs conformes à ce modèle sont apparemment de plus en plus rares et difficiles à trouver. Qu’est-ce qui ne va pas ? …
Une réponse proposée est que l’attention s’est déplacée de la prédication à d’autres formes nécessaires du ministère pastoral : la relation d’aide, la liturgie, la dynamique de groupe et d’autres préoccupations… Mais la faiblesse de ce point de vue est dans le fait qu’il n’est pas nécessaire de mettre ces choses en opposition avec la bonne prédication…
La réponse est que la dégénérescence à laquelle la prédication actuelle est assujettie est due, non pas à des causes externes, mais à un affaiblissement dans la confiance en la Bible comme Parole inerrante de Dieu revêtue de son autorité, chez les théologiens de l’Eglise, chez les professeurs des facultés de théologie, et enfin chez les pasteurs formés par eux. Il s’agit tout simplement d’une perte de confiance dans l’existence d’une Parole sûre venant de Dieu… N’ayant pas la conviction que la Bible est sans erreur en tout et dans ses parties, ces savants et ces prédicateurs font une approche de la Bible autre que celle des « inerrantistes ».
Dans leur recherche de la Bible (pour autant qu’ils y font des recherches), ils cherchent les lumières qu’elle serait capable de jeter sur le monde et la vie «tels que le pasteur les conçoit», plutôt que de voir dans l’Ecriture cette révélation surpuissante qui nous dit ce que nous devons penser au sujet du monde et de la vie… Notre première thèse est, donc, que « la baisse actuelle dans la prédication-exposition est due dans une grande mesure à une perte de conviction par rapport à l’autorité biblique, et que cette perte elle-même doit être attribuée à un éloignement de cette conception élevée de l’inspiration qui comprend aussi l’inerrance ». (J.-M. Boice, p. 125s.)
Edification des croyants
Si, par la grâce de Dieu, nous nous laissons corriger, nous redécouvrirons le ministère de la Parole que le Seigneur a confié aux pasteurs/docteurs, pour assurer aux fidèles une nourriture solide par un enseignement systématique de « tout le conseil de Dieu ». Nous ne permettrons à rien de se substituer à cela. Plutôt que de choisir nous-mêmes les thèmes qui nous paraissent importants ou intéressants, nous céderons à Dieu la constitution de l’ordre du jour, par l’étude et l’enseignement suivis de livres entiers de la Bible ! Nous veillerons à ce que les croyants lisent, méditent, étudient les Ecritures eux-mêmes, pour s’en imprégner et devenir véritablement le peuple du Livre qui le connaît, l’aime, le vit et le proclame avec… autorité !
Evangélisation des inconvertis
Nous refuserons toute édulcoration, toute dilution de l’Evangile, toute tentation de présenter un Evangile tronqué ou à l’eau de rose. Car nous n’avons pas une marchandise au goût du jour à vendre, garantie de rendre nos auditeurs heureux. Certes, nous annoncerons la grâce, la miséricorde et l’amour de Dieu ! Mais dans notre prédication de la Croix nous proclamerons que Dieu ordonne à tous les hommes partout qu’ils aient à se repentir car, de toute manière, ils ont tous rendez-vous avec son Fils, Sauveur pour les uns, Juge pour les autres. Et nous n’escamoterons pas le prix que celui qui s’engage dans la foi doit être prêt à payer pour devenir un disciple du Seigneur Jésus-Christ.
Dieu et le monde
Enfin nous proclamerons l’autorité de Dieu sur le monde. Nous rappellerons l’autorité d’Elohim, Dieu créateur tout-puissant, sur sa création dont il régit le fonctionnement conformément aux lois matérielles qu’il a lui-même établies, lois que nous respecterons nous-mêmes dans une saine gestion des biens qui nous ont été confiés, comme un signe du royaume messianique qui vient.
Nous insisterons sur l’autorité d’Adonaï, Dieu-Seigneur, Dieu des nations, devant qui les peuples sont responsables de se conformer aux lois morales qu’il a établies et révélées dans sa Parole, ce Dieu dont ils ont subi, subissent encore et subiront les justes jugements pour leur impiété et injustice, et avec qui ils ont rendez-vous pour rendre compte de leur comportement. Je vois là un thème biblique important, presque entièrement ignoré par nos communautés évangéliques…
Enfin, nous déclarerons, bien entendu, les merveilles de YHVH, l’Eternel qui existe en et par lui-même d’éternité en éternité, Dieu qui se révèle, Dieu de la rédemption, qui vient au secours de l’homme déchu, coupable et perdu, pour le racheter, le régénérer, le justifier, l’adopter, le transformer, et pour entrer dans une Alliance de grâce avec lui. Et tout cela dans la conformité aux lois spirituelles qui émanent de lui.
Gloire soit rendue à Dieu, Père, Fils et Saint-Esprit, pour sa Parole inspirée, revêtue d’autorité. Le monde passera, et ses convoitises aussi, mais la Parole de Dieu ne passera jamais, et celui qui s’y soumet pour faire la volonté de Dieu demeure éternellement. Amen.
F.H.
NOTE
1. La première partie de cet exposé a paru dans Servir n°4 de Juillet-Août 1990.
Bibliographie
ARCHER Gleason L, dans The Foundation of Biblical Authority (Zondervan, Grand Rapids, 1979), p. 85ss.
D’AUBIGNE J.-H. Merle, L’Autorité des Ecritures inspirées de Dieu, (Société des livres religieux, Toulouse, 1865).
BERTHOUD Pierre, L’Autorité et l’interprétation de la Bible, dans Dieu parle, (Editions Kerygma, Aix-en-Provence, 1984), p. 1ss.
BOICE James Montgomery, The Preacher and God’s Word, dans The Foundation of Biblical Authority, (Zondervan, Grand Rapids, 1979) p. 123ss.
COURTHIAL Pierre, Fondements pour l’avenir (Ed. Kerygma, Aix-en-Provence, 1981).
EUI Whan Kim, The Authority of the Bible and the Lordship of Christ, dans Let the Earth Hear His Voice (Worldwide Publications, Minneapolis, 1975), p. 985ss.
GELDENHUYSJ. Norval, Authority and thé Bible, dans Revelation and the Bible, (Baker Book House, Grand Rapids, 1958), p. 369ss.
HORTON Frank, notes de divers messages.