L’esprit de jugement
par Alain Monclair1
« De tous les hommes que je connais, disait le célèbre humoriste américain Mark Twain, le seul intelligent, c’est mon tailleur. Chaque fois que je vais chez lui, il reprend mes mesures ; quant aux autres, ils m’ont mesuré une fois pour toutes et se figurent que leur jugement est toujours à ma taille. »
L’esprit de jugement guette à tout instant l’homme d’aujourd’hui, et le conseil deux fois millénaire de Jésus est plus à propos que jamais. Ne jugez pas les autres, afin que Dieu ne vous juge pas, disait-il. Car Dieu vous jugera de la façon dont vous jugez, et il utilisera pour vous la mesure que vous employez pour les autres (Mt 7.1 -2).
La crise morale que vit notre monde offre chaque jour à nos yeux un terrible spectacle, sur lequel nous voudrions mettre un carré blanc. Mais ce spectacle est là, dans la rue, dans les journaux, à la télévision. Comment ne pas voir toutes ces pailles d’immoralité et d’hypocrisie, car comme le disait quelqu’un : « II en est des défauts comme des phares des automobiles : seuls ceux des autres nous aveuglent ! »
Jésus nous demande de renoncer à juger notre prochain, car le jugement de l’homme est destructeur. « C’est probablement pour cela que nous avons tous si peur du jugement des hommes », écrit le psychiatre Paul Tournier, en ajoutant : « Comme toutes les autres peurs, il s’agit d’une manifestation de l’instinct de conservation. Nous nous défendons contre les jugements avec la même énergie que nous mettons à nous défendre contre la faim, le froid, ou les bêtes féroces. Car c’est une menace mortelle. Et plus nous nous sentons concernés par la cause de Dieu, plus nous voulons aider les hommes à le servir, plus aussi nous sommes pressés de dénoncer le mal et de louer le bien, de démasquer les méchants et de rendre hommage aux justes, bref de nous poser en arbitres du bien et du mal. Et c’est justement ce que la Bible nous interdit. »
Comment devons-nous réagir ? Jésus nous donne la réponse, il nous invite à regarder en nous-mêmes pour découvrir la poutre qui se cache dans notre œil. Lorsque nous aurons découvert la poutre, montrons-la-lui, demandons-lui de l’ôter de notre œil, et ensuite nous n’aurons plus envie de juger notre prochain. Nous aurons simplement envie de l’aider, non plus du haut de notre propre justice, mais en position d’égalité, en pécheur pardonné. Un pécheur pardonné ne cache pas ses fautes sous un manteau d’hypocrisie, mais il est prêt à dévoiler sa propre misère pour aider son prochain.
Car comment pourrons-nous conseiller à quelqu’un d’avouer sa faute si nous ne montrons pas l’exemple ?
N’oublions jamais que Dieu peut changer un homme.
Chacun de nous devra rendre compte à Dieu pour soi-même, écrivait Paul aux Romains en ajoutant ce conseil : Cessons donc de nous juger les uns les autres. Prenez plutôt la décision que voici : ne rien faire qui amène votre frère à trébucher ou à tomber dans le péché (Rm. 14.13).
A.M.
Note
1 : Tiré avec permission de « Hissez le grand foc »