L’autorité de la Bible dans la prédication
par Samuel Perez Millos 1
La prédication est intimement liée à l’essence même du ministère de l’Eglise dans le monde. Mais sur quoi se fonde cette prédication ? Où puise-t-elle son autorité ? Le Christ, puis les apôtres nous donnent la réponse.
I. Modèles bibliques
1. L’exemple du Christ
Christ commença son ministère par la prédication d’un Evangile qu’il appelait «repentance et foi» (Mc 1.15). Dans sa proclamation de la « bonne nouvelle » on remarque une insistance notable sur l’enseignement, ministère que le maître exerçait en toutes occasions propices. Dans les synagogues (Mc 1.21), sur la montagne (Mt 5.1-2), en chemin (Mc 9.30-31), Christ enseignait et prêchait. L’effet que ses paroles produisaient sur les gens n’était pas dû à son art oratoire ou à ses discours étudiés, mais au pouvoir d’un message qui jaillissait de ses lèvres avec toute autorité (Mt 5.28-29).
En quoi consistait cette admirable autorité ? Etait-elle la conséquence de sa double nature, divine et humaine ? Provenait-elle du pouvoir de l’Esprit qui dirigeait ses actions ? Le secret du message du Christ était dans l’élément qui le nourrissait : la Parole de Dieu.
Le secret du message du Christ était dans l’élément qui le nourrissait : la Parole de Dieu.
Jésus était un prédicateur qui exposait la Parole. Il en présentait clairement son sens correct et en faisait une application opportune. N’était-ce point là la raison principale du Sermon sur la Montagne ? C’est ainsi que fut tout le ministère oral du Christ, toujours lié à l’Ecriture. Ainsi, au dernier jour de sa présence sur la terre, sur le chemin d’Emmaüs, il mettait l’accent, une fois de plus, pour ses disciples incrédules, sur l’accomplissement de l’Ecriture dans les événements à Jérusalem. La Parole fut toujours présente dans la pensée, le coeur et le message de Jésus-Christ.
2. L’exemple des apôtres
Paul ordonne à son disciple Timothée : « … Prêche la Parole ».
Le chrétien est appelé à un ministère identique à celui du Christ : prêcher l’Evangile et enseigner. Matthieu en fait part de façon évidente : « Faites des disciples de toutes les nations… et enseignez-leur à garder tout ce que je vous ai prescrit » (Mt 28.19-20). Ces deux aspects, proclamer l’Evangile et enseigner – ou faire des disciples – sont intrinsèquement liés à la prédication de la Parole.
Ce concept était bien ancré dans l’Eglise apostolique où la prédication de l’Evangile était accompagnée de l’enseignement doctrinal. Le message évangélique était une présentation claire de la Bible, à tel point qu’on parlait des convertis comme de « ceux qui avaient accepté la Parole » (Ac 2.41). Sans aucun doute le texte fait référence au message proclamé devant eux, mais il n’en est pas moins évident que les messages des temps apostoliques étaient nourris de la Parole.
Il suffit de penser à la première prédication au jour de la Pentecôte, où les citations de l’Ecriture imprègnent le message (Ac 2.17-21, 25-28, 34-35). C’est aussi le cas du premier exemple rapporté d’évangélisation personnelle (au ministre éthiopien), qui consista à expliquer et interpréter une partie de la prophétie d’Esaïe (Ac 8.35). De tels messages produisaient d’importants résultats. Des milliers de personnes se convertissaient au Seigneur.
Le message évangélique était une présentation claire de la Bible, à tel point qu’on parlait des convertis comme de « ceux qui avaient accepté la Parole ». |
II. Au fil des siècles
Au fur et à mesure que le temps s’écoulait, l’Ecriture disparaissait progressivement du message de l’Eglise pour en arriver à des époques d’obscurantisme bien connues ; il surfit de revoir l’histoire de l’Eglise pour s’en rendre compte.
1. La Réforme
La Réforme apporta un nouveau concept. La « Sola Scriptura » (l’Ecriture seule) était le principe qui guidait les prédicateurs dont le message attirait et transformait puissamment des milliers de personnes et changea même le cours de l’Histoire.
La « Sola Scriptura » était le principe qui guidait les prédicateurs de la Réforme.
2. Les Réveils
Plus récemment, les mouvements de réveil dans l’oeuvre évangélique et missionnaire du siècle passé (dont les Assemblées sont un fruit) eurent pour fondement une évangélisation clairement biblique et christocentrique, allant de pair avec un enseignement approfondi et systématique de la Parole.
Un évangile au rabais produit beaucoup d’émotions, mais très peu de conversions.
3. De nos jours
La prédication actuelle de l’Evangile s’est dégradée. Ne prêche-t-on pas trop souvent « les Assemblées » plutôt que la Parole ?
Les traditions et les expériences ne se sont-elles pas substituées à la prédication solide du vrai message biblique ?
De même, les questions superficielles, définies par erreur comme «dévotionnelles», ont rejeté de la prédication l’enseignement systématique.
Le résultat est clair et évident: cet Evangile au rabais produit beaucoup d’émotions, mais très peu de conversions ; cet enseignement engendre des milliers d’ »enfants spirituels » qui sont facilement emportés à tout vent de doctrine (Ep 4.14). Cet infantilisme spirituel est en train de provoquer de sérieux problèmes dans nos églises et oeuvres.
La force de la communauté provient de l’enseignement systématique de l’Ecriture.
Il est à la base de nombreuses tensions, de divisions, de dissentiments, de séparatismes, de légalismes, de libéralismes, etc., qui affaiblissent l’oeuvre à un point réellement alarmant.
Face à cela, il serait utile d’entamer une réflexion biblique sur les fondements de la prédication.
III. La Parole dans l’évangélisation
L’Evangile est suivant l’enseignement de Paul, un message puissant (grec, dunamis), de la « dynamite divine », pour le salut (Rm 1.17).
L’Evangile est un message théologique et non un discours anthropologique, c’est-à-dire qu’il a sa source en Dieu et non dans les hommes. Paul enseigne cette vérité avec insistance : « L’Evangile qui a été annoncé par moi n’est pas de l’homme, car moi-même je ne l’ai pas reçu, ni appris d’un homme, mais par une révélation de Jésus-Christ » (Ga 1.11-12).
Voilà la cause de l’intransigeance de l’apôtre. Il ne tolère aucune altération du message de l’Evangile. Paul annonce le message divin qu’il appelle « la Parole de la croix ». Il ne veut pas s’appuyer sur l’art oratoire (« une supériorité de langage »), ni sur les raisonnements philosophiques (« sagesse des hommes »: 1 Co 2.1, 4) mais sur l’exposé clair d’un message qui présente le Sauveur et son oeuvre à la croix.
L’Evangile est de la « dynamite divine » pour le salut.
Une modification quelconque dans le message de l’Evangile, une proclamation de l’Evangile qui ne soit pas nourrie de l’Ecriture, et qui n’est pas un clair exposé de la doctrine biblique, devient « un autre évangile » (Ga 1.7), qui transforme la bénédiction en confusion et contradiction. L’Evangile anthropologique satisfait l’homme, c’est pourquoi le prédicateur applaudi n’est pas obligatoirement celui qui s’attache au message biblique.
Les chrétiens immatures n’aiment pas les messages doctrinaux (c’est ce que dit l’apôtre Paul en 2 Tm 4.3-4) ; ils préfèrent les sujets émotifs, voire des fables.
Trop de prédicateurs prononcent des messages dans lesquels l’Ecriture n’est utilisée que comme un prétexte.
L’Evangile prétexte ou fondement du message.
Paul est très clair : « Mais si nous-mêmes, ou si un ange du ciel vous annonçait un évangile différent de celui que nous vous avons annoncé, qu’il soit anathème ! » (Ga1.8). Nous avons été appelés à proclamer l’Evangile et non un évangile. L’Evangile biblique est un évangile « christocentrique » : la Personne admirable de Jésus doit occuper la place centrale du message.
IV. La Parole dans l’enseignement
Le second aspect du service dans l’Eglise est l’enseignement des chrétiens. Cette responsabilité doit être assumée par les dirigeants de la communauté, pour qu’il soit donné dès le moment où une personne reçoit Christ. L’évangélisation biblique est intimement liée à l’enseignement puisque le but n’est pas de «faire des adeptes » mais de « faire des disciples » (Mt 28.19).
Ces disciples doivent se caractériser par une marche fidèle ; pour cela il est nécessaire qu’ils connaissent bien la doctrine et l’éthique pour les respecter selon ce que Christ lui-même a établi (Mt 28.20).
L’exemple de l’Eglise des premiers temps est évident. Toutes les communautés du Nouveau Testament mirent l’accent sur l’enseignement et cela dès le début : « Ils persévéraient dans l’enseignement des apôtres… » (Ac 2.42). Les apôtres enseignaient quotidiennement la doctrine à la communauté. Les convertis devaient progresser vers la maturité spirituelle. Pour cela il fallait les nourrir avec la doctrine de base, simple et claire (1 Pi 2.2).
La prédication qui expose et explique la Parole est une nécessité.
Maturité spirituelle, croissance, témoignage vont de pair. Ainsi, à Antioche, la première des préoccupations de Barnabas, en voyant la progression de l’Evangile, fut de former l’Eglise naissante. A cet effet, il fit appel à Paul. Tous deux consacrèrent une année à un programme de formation de l’Eglise (Ac 11.26). La force de cette communauté fut la conséquence de l’enseignement systématique de l’Ecriture.
Le fondement de toute église locale est la « doctrine des apôtres » (Ep 2.20). Toute autre approche n’aura pour résultats que de perpétuer « l’infantilisme spirituel » de quelques « petits enfants » facilement emportés par de fausses doctrines (Ep 4,14). C’est hélas, l’état de beaucoup de communautés qui ne pratiquent pas l’enseignement systématique de l’Ecriture. Une multitude de problèmes, tels que les divisions internes, le rejet de communautés soeurs, sont les tristes comportements typiques de personnes immatures, et le résultat du manque de formation biblique de ces chrétiens (1 Co 3.1-4). La prédication qui expose et explique la Parole est une nécessité.
Quand on néglige cette mission que nous a laissée le Seigneur, les problèmes apparaissent et l’Eglise échoue. Les conducteurs de l’Eglise locale doivent trouver les moyens pour que la communauté reçoive un enseignement systématique des Ecritures. Ils sont responsables devant le Seigneur d’empêcher que la chaire ne soit utilisée à des fins que Dieu n’a pas prévues. On ne doit jamais oublier que ce que Dieu bénit, c’est sa Parole et non celle des hommes (Es 55,11).
Quelle importance donnons-nous, dans notre vie et dans notre service, à la Parole de Dieu ?
S. P. M.
NOTE :
1. Traduction abrégée par F-J. et S. Martin d’un article paru dans la revue des Assemblées espagnoles Edificacion cristiana.