La première épitre de Jean
(4ème partie)
par Alain KITT
La doctrine
Qu’est-ce que nous croyons ? Vaste sujet ! Nous n’allons nullement l’épuiser dans une étude, mais seulement voir ensemble ce que l’apôtre Jean veut nous dire à ce sujet, et l’importance qu’il y attache. Car, ne nous y trompons pas, c’est un sujet important ; il l’était à l’époque où Jean a écrit, il l’est encore de nos jours, malgré le relativisme ambiant (« Ce que tu crois, c’est très bien si ça marche pour toi ; ma vérité à moi, n’est pas la même »). Ce relativisme peut, malheureusement, très bien infiltrer l’église, de sorte que nous prêcherons, si nous n’y faisons pas attention, un « évangile » dilué1.
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Certes, le Seigneur Jésus a insisté sur l’importance de l’humilité, et l’apôtre Paul nous dit de ne pas avoir une trop haute opinion de nous-mêmes (Rm 12.3, Français Courant). Mais ni le Seigneur, ni ses apôtres ne permettent de penser qu’on peut croire ce qu’on veut, pourvu que l’on soit sincère. Si les pharisiens – gens religieux s’il y en eut ! – à qui Jésus avait parlé ne croyaient pas en lui, ils mourraient dans leurs péchés (Jn 8.24). La Samaritaine dut accepter que le salut venait des Juifs (et non pas de la religion dans laquelle elle avait été élevée), et voir en Jésus le Messie promis (Jn 4).
Paul dit avec insistance aux Athéniens, religieux et bien instruits, qu’ils devaient se repentir et croire en celui que Dieu avait ressuscité d’entre les morts (Ac 17.30-31).
Nous ne pouvons donc pas nous désintéresser de la doctrine ; nous devons tous être des théologiens, c’est à dire des étudiants de la parole (.logos) de Dieu (.tbeos), capables de donner les raisons de notre espérance (1 P 3.15).
1. L’Evangile est une vérité absolue
II ne s’agit pas d’une vérité parmi d’autres : tout autre enseignement, d’où qu’il vienne, et qui contredirait la vérité de l’évangile, serait un mensonge. Jean écrit au sujet de « la parole de vie » qui était dès le commencement (1 Jn 1.1) et qui n’a pas changé : L’amour de Dieu est parfait en celui qui garde sa parole (2.5). Les chrétiens auxquels Jean écrivait savaient la vérité et devaient s’accrocher à ce qu’ils avaient entendu dès le commencement (2.21,25).
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Au chapitre 4, il est question de « l’esprit de la vérité » et de « l’esprit de l’erreur » ; deux esprits totalement contradictoires. La vérité, qui est de Dieu, est reconnaissable à son contenu bien défini (4.2-3).
L’évangile, c’est le « témoignage de Dieu » (5.9), témoignage rendu à son Fils. Or Dieu ne va pas rendre des témoignages contradictoires, ou changer d’avis, ou modifier ses paroles selon les gens à qui il parle ! Non, son témoignage reste absolument fidèle et digne de confiance. Refuser de croire ce témoignage, nous rappelle ce verset, revient à dire que Dieu a menti. Et l’apôtre rejoint les paroles de Jésus lui-même lorsqu’il écrit (5.11-12) que si nous rejetons le témoignage de Dieu à l’égard de son Fils, nous rejetons du même coup la vie éternelle (Jn 5.24, 39-40).
2. Comment distinguer le vrai du faux ?
Les faux docteurs combattus dans cette lettre se trompaient surtout en ce qui concernait la personne et l’oeuvre du Seigneur Jésus. Ils voulaient séparer « le Christ » de « l’homme Jésus », disant que « le Christ » serait descendu sur Jésus au moment de son baptême, pour le quitter avant sa mort. Voilà pourquoi Jean insiste tellement sur le fait que « Jésus » et « le Christ » sont inséparables. C’est pour cela que dans cette épître nous ne trouvons presque jamais le nom de Jésus tout seul : c’est « Jésus-Christ », ou « Jésus-Christ venu en chair » (4.2), ou « Jésus le Fils de Dieu » (4.15). Nous retrouvons la même préoccupation dans la deuxième lettre (2 Jn 7-9) : ceux qui prêchent une autre doctrine sont des séducteurs, manifestant l’esprit de l’antichrist.
Il ne s’agit pas d’une querelle de mots, d’une simple question de terminologie : c’est le coeur même de l’Evangile. Seul Jésus-Christ, le Fils de Dieu venu en chair, pouvait faire connaître le Père (Jn 1.18) et apporter la vie étemelle en devenant la victime expiatoire pour les péchés du monde entier (1 Jn 2.2) ; il n’y a pas de communion avec Dieu, ni les uns avec les autres, si nous nions cette vérité fondamentale.
3. Conséquences pour nous
Le monde, en cette fin du XXe siècle, est certes bien différent de celui que l’apôtre Jean a connu. Le coeur de l’homme, lui, n’a pas changé. Cette épître nous montre que le phénomène des sectes, si préoccupant de nos jours, n’est pas un phénomène nouveau : il y en avait déjà au 1er siècle ! Et la manière de reconnaître les faux docteurs de nos jours est la même que celle préconisée par l’apôtre : « tout esprit qui confesse Jésus-Christ venu en chair est de Dieu ; et tout esprit qui ne confesse pas Jésus n’est pas de Dieu, c’est celui de l’antichrist » (4.2-3).
Les sectes dites « chrétiennes » se reconnaissent encore et toujours par leur refus d’honorer de façon biblique le Seigneur Jésus-Christ. Malgré les prétentions des uns et des autres d’honorer Dieu, la parole de la Bible est claire : « celui qui n’honore pas le Fils, n’honore pas le Père qui l’a envoyé » (Jn 5.23).
4. Deux pistes de réflexion pour terminer notre étude
a) Comment expliquer la réussite des sectes, et comment contrecarrer leur influence ?
Les raisons de la réussite des sectes sont certainement multiples : spirituelles, sociologiques, psychologiques, etc. Quel lecteur n’a pas été étonné de la facilité avec laquelle des personnes intelligentes, réfléchies, bien instruites, se laissent apparemment embobiner par les idées les plus farfelues proposées par certains gourous de nos jours ?
Comment, malgré notre civilisation rationaliste, en arrive-t-on aux excès que nous avons vus en France récemment ? Il n’y a pas de réponse simple à ces questions. Mais l’apôtre Jean nous fournit une idée qui mérite réflexion : le langage des sectes est le langage du monde. C’est ce qui apparaît au ch.4 et au v.5 : les faux prophètes, dit Jean, sont du monde, leurs paroles viennent du monde, et le monde les écoute. Qu’est ce que cela veut dire ?
L’enseignement des sectes, malgré leur diversité complexe, revient au fond à une religion des oeuvres : qu’il s’agisse des faux prophètes du 1er siècle ou des sectes du XXe, toutes enseignent que notre salut dépend de nos efforts. Pour ceux-là, on pouvait soi-même atteindre un niveau de connaissance divine supérieur au commun des mortels ; pour celles-ci le salut réside dans des formules magiques, dans l’obéissance à des règles humaines.
On n’a donc pas besoin d’un Sauveur, et cela plaît à la pensée humaine, puisqu’on aurait quelque chose à faire pour gagner le salut. L’Evangile, par contre, ne laisse aucune place à l’orgueil : le salut est pour ceux qui reconnaissent leur faillite totale devant Dieu, leur besoin absolu de sa grâce.
b) Comment alors contrecarrer l’influence des sectes ?
D’abord en résistant à leur enseignement. Les destinataires de cette lettre avaient vaincu les faux prophètes en leur résistant, de sorte que ceux-ci étaient sortis de l’église (2.19; 4.4). Par la connaissance de la vérité nous vaincrons le mensonge. Si nous avons une certaine connaissance de l’enseignement des sectes2, tant mieux, mais ce n’est pas le plus important. On a dit que pour pou-voir reconnaître de faux billets de banque, rien ne vaut une connaissance parfaite des vrais !
Deuxièmement, en vivant selon l’Evangile. L’épître enseigne que le vrai chrétien aime Dieu de tout son coeur, obéit aux commandements et aime ses frères et soeurs. Les sectes, malgré leurs promesses et malgré le changement qu’elles peuvent apporter dans certains domaines, ne transforment pas l’homme. Dieu, lui, le transforme par la puissance de l’Evangile. Peut-être qu’une autre raison de la réussite des sectes se trouve dans la trop grande conformité de la vie de ceux qui se présentent comme chrétiens à la vie du monde.
Que la lecture et la méditation de cette épître puissent nous inciter à nous sonder à la lumière de la parole de Dieu, pour que notre témoignage soit vigoureux, joyeux, convaincant, par la puissance du Saint-Esprit.
A.K.
NOTES
1. Voir, à ce propos, l’excellent article de Frank Horton, « Quel évangile pour aujourd’hui » ? Servir n° 5. 1996.
2. Voir par exemple de Walter Martin, Le monde des sectes, (éd. Vida). Il existe aussi plusieurs bons livres chrétiens sur les sectes les plus importantes.