Ne sois pas juste à l’excès

 equilibre

par Jean-Pierre BORY

 

 

Eccl 7.16-18 : Ne sois pas juste outre mesure et ne sois pas trop sage, pourquoi te détruirais-tu ? Ne sois pas non plus méchant outre mesure et ne sois pas insensé. Pourquoi voudrais-tu mourir avant ton temps ? Tu feras bien de prendre garde à l’un comme à l’autre ; oui, celui qui respecte Dieu suivra ces deux conseils.

 

Certains ont vu dans cette recommandation de l’Ecclésiaste un encouragement à une attitude frileuse (D. Kidner) : il serait ainsi plus sage, humainement parlant, de ne pas prendre de positions tranchées, de ne pas trop s’engager, de peur que cela ne se retourne contre soi. Sage conseil de n’en faire ni trop, ni trop peu. Un proverbe chinois dit : « La plante qui pousse le plus vite, est la première coupée. » C’est une position raisonnable et très humaniste.

 

Mais l’Ecclésiaste ne recommande pas ici la médiocrité, plutôt l’humilité et la vraie sagesse (remarque de A. Maillot). L’homme est souvent tenté d’appliquer à la réalité matérielle de la vie, des règles et des principes éthiques, et d’en exiger des autres et de lui-même un respect légaliste. Il s’enorgueillit alors d’être plus juste, plus moral que les autres.

 

Il s’imagine parfait, sans failles, se plaçant inconsciemment à un niveau divin. Bien vite, les réalités de la vie, sa propre nature pécheresse démontrent sa folie, son irrespect de Dieu et les conséquences d’une telle attitude orgueilleuse : tu te détruirais toi-même. Jésus reprenait sévèrement les Pharisiens qui tombaient dans ce travers de l’orgueil et de l’hypocrisie.

 

« Il faut beaucoup d’humilité et de réserve à la fois dans la conception et la pratique de la morale, et l’on doit se souvenir que toutes les morales sont conditionnées par les limitations humaines et entachées de péché. L’orgueil moral fait de la vertu, le véhicule même du péché ! » (Nouveau Commentaire Biblique).

 

Dans la vie chrétienne, cette poursuite excessive de la justice, de la perfection peut avoir des conséquences très négatives dans divers domaines : éducation des enfants, exigences vis-à-vis des frères et soeurs dans l’Eglise, perfectionnisme personnel, piétisme culpabilisant…

 

On peut placer la barre si haut pour soi-même que l’on est incapable de l’atteindre et le résultat en est le découragement, la tristesse, la dépression.

 

Il ne s’agit pas de tomber dans une prudence, une sagesse humaniste, mais d’en rester à la crainte de Dieu (v18), au respect de ses exigences, comptant avec humilité sur lui, qui est à la fois souverain et plein d’amour.

 

J-P.B.