Métier : sexologue

 

interview

 

 

Béatrice HATTE, médecin et sexologue, membre d’une CAEF dans le sud-ouest de la france, a accepté de répondre à quelques questions pour « SERVIR ».

 

 

 

dialogue-2En quoi consiste votre profession ?

 

J’exerce la sexologie dans le cadre de la médecine générale. Je me suis intéressée à la sexologie parce que j’aime tout ce qui est relatif au couple, et c’est pour cette raison que j’ai fait cette formation. J’exerce la sexologie au cas par cas. Si mon mari (médecin), par exemple, a un patient qui a des difficultés dans ce domaine, il me le confiera.

 


Il faut préciser que cette discipline concerne spécifiquement les relations sexuelles bien que ma profession m’amène aussi à donner des conseils de vie. Lacté sexuel est un peu comme la cerise sur le gâteau, il fait partie d’un ensemble. Il y a un côté relationnel, psychologique, éducatif. Avec telle personne je développerai la question éducation, avec une autre, plus la question médicale, et pour cette autre qui vient de divorcer, ce sera davantage l’aspect psychologique… c’est en fait très vaste. Finalement j’ai été amenée dans des champs plus larges, comme le comité éthique de la FEF ou à la rédaction d’articles comme celui qui vient de sortir sur la contraception.

 

 

dialogue-2Les « églises chrétiennes » ont une approche assez variée de la sexualité. Quelles différences faites-vous entre l’approche biblique de la sexualité et ces différentes approches ?

 

Dans l’église catholique, il y a eu une négation du « corps », qu’on retrouve aussi dans des courants orthodoxes, ou des courants protestants très étroits. Je pense que ce qui donne vraiment l’équilibre, c’est la parole de Dieu. Vous voyez par exemple le Cantique des Cantiques, on parle des seins, du corps, de la beauté…, il n’y a donc pas cette négation du corps. Il est écrit aussi dans la Bible de ne pas se priver l’un de l’autre (1 Co 7), d’honorer le corps de l’autre, de faire plaisir à l’autre. Dans ce domaine, il faut aussi utiliser l’intelligence que Dieu nous a donnée.

 

Il y a des interdits religieux qui ne sont pas toujours tirés de la Bible. Certains, comme les relations sexuelles hors du mariage ou l’adultère sont effectivement clairement enseignés. Mais l’acte sexuel n’est pas interdit (il est même encouragé chez le couple marié), ni le mariage en lui-même. Paul écrit que le responsable ou l’évêque soit mari d’une seule femme (Tt 1.5-6) contrairement à ce que certains enseignent en présentant le célibat comme une obligation pour servir Dieu. Cet enseignement est d’ailleurs condamné dans la Bible (1 Tm 4.1-3).

 

 

dialogue-2Depuis quelques décennies, la culture ambiante surévalue la sexualité, voire même, la pervertit. Quelles perversions de la sexualité vous paraissent les plus présentes dans notre société ?

 

Je soulignerai d’abord quelque chose qui est tout à fait banalisé, en particulier dans les films, ce sont les relations hors mariage. Les jeunes qui regardent ce genre de films – d’ailleurs pas nécessairement pornographiques, ni même violents – reçoivent le message suivant : On s’aime, on couche ensemble, on commence à vivre ensemble et on voit si ça marche. En fait, ce n’est pas du tout la norme divine.

 

La norme divine c’est de se connaître d’abord psychologiquement, voir si on veut vivre la vie à deux. Dans les médias, le processus est inversé. De nos jours l’acte sexuel n’est plus fondateur du mariage, mais souvent c’est l’arrivée du premier enfant.

 

Il y a aussi une sur-valorisation du coup de foudre où l’on se base sur l’apparence, sur des sentiments momentanés et fugitifs sans aller en profondeur. Cependant construire une vie de couple à deux nécessite un cheminement, des concessions à faire… Il faut être réaliste.

 

 

dialogue-2Quels principes de base estimez-vous importants pour que la sexualité dans un couple chrétien soit la plus épanouie ?

 

La communication verbale est fondamentale : savoir prendre du temps ensemble, discuter, ne pas cacher ses émotions et ses impressions. Si vous ne savez pas communiquer ce que vous pensez ou ressentez, vous ne serez pas épanouis. C’est important d’être soi-même, de ne pas jouer un rôle. Il n’y a pas de honte à dire « je suis en colère, je n’ai pas apprécié ce que tu as fait » Cela permet de libérer cette émotion négative.

 

Le pardon est aussi fondamental sinon l’amertume commence à s’installer et, comme dit la Bible, les racines d’amertume produisent toujours de mauvais fruits.

 

Il faut aussi l’acceptation de soi : pouvoir s’aimer soi-même, non dans un sens narcissique mais dans le sens biblique du terme. Accepter ce que Dieu fait à travers nous, accepter son corps, permet au couple de vivre d’une manière épanouie dans sa relation. La relation sexuelle suit la communication. S’il y a une bonne communication, s’il y a le pardon et l’amour, généralement la sexualité se passe bien. Les couples disent que cela va même mieux au fil des années. Il y a très souvent une meilleure entente sexuelle à 40 ans qu’à 20 ans.

 

Propos recueillis par Reynald KOZYCKI

 

« L’amour conjugal qui persiste à travers mille vicissitudes, me paraît être le plus beau des miracles, quoiqu’il en soit le plus commun ».

François Mauriac

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