L’assistance médicale à la procréation (AMP)
par Alain et Françoise LOMBET
Anciennement appelée Procréation Médicalement Assistée (PMA), c’est l’ensemble des moyens et des techniques mis en œuvre pour suppléer une souffrance du couple, la stérilité. Elle résulte de la rencontre de l’ovule et du spermatozoïde dans une éprouvette pour une fécondation in vitro (FIV). De tout temps (Gn 1.28), l’homme a pour but d’être fécond, de se multiplier. C’est une pulsion de vie qui le pousse à laisser sa trace dans sa descendance et la stérilité est ressentie comme un échec, une malédiction (Gn 30.1). Tous les moyens sont-ils bons pour remédier à cette souffrance ? Quels en sont les limites, les risques et le droit ?
L’AMP est désormais une technique très fréquemment utilisée : 28 ans après la naissance du premier bébé-éprouvette, on constate qu’environ 40.000 prélèvements d’ovocytes sont pratiqués chaque année en France, près de la moitié d’entre eux étant faits pour essayer d’obtenir des fécondations par micro-injections de spermatozoïdes (méthode ICSI).
Les chiffres en France
En France, depuis 1981, près de 130 000 enfants sont nés à la suite d’une assistance médicale à la procréation. Désormais on enregistre 9 000 naissances par an dont plus de 50% dans le cadre d’une ICSI. Le taux de réussite varie de 20% pour la FIV à 23% pour l’ICSI. En limitant depuis quelques années le nombre d’embryons transférés en même temps dans l’utérus, le taux de grossesses multiples a baissé : de 6 à 8% il y a une dizaine d’années, il est passé à 1,5% aujourd’hui. Le Dr Mouzon, spécialiste des questions de reproduction à l’INSERM estime que l’AMP représente 120 millions d’euros par an.
Le traitement de la stérilité est pris en charge à 100% par la Sécurité sociale, toute tentative étant désormais remboursée dans la limite de 6 tentatives. La France est au premier rang dans le monde pour ces dépenses et c’est le seul pays au monde qui rembourse l’AMP.
Ce que permet la loi en France
En 1994, le législateur a retenu les principes suivants :
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une autorisation légale est nécessaire,
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seul un couple hétérosexuel a le droit de recourir à une AMR l’homme et la femme formant le couple doivent être mariés ou justifier d’une vie commune d’au moins deux années et doivent être en âge de procréer,
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le consentement des deux membres du couple est placé au cœur des règles édictées,
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l’AMP n’intervient à l’intérieur du couple que lorsque la procréation ne peut être réalisée naturellement pour des raisons physiologiques ou médicales,
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le législateur a institué la primauté de la procréation à l’intérieur du couple sur la procréation exogène (AMP avec donneur et don d’embryon) qui n’intervient que comme « ultime indication »,
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la maternité de substitution et la gestation pour autrui (mères porteuses) sont interdites,
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la congélation des embryons est autorisée (environ 150.000 aujourd’hui sont congelés en attente…). Au bout de 5 ans, en l’absence de projet parental du couple ou en cas de décès du conjoint, il sera mis fin à la conservation de ces embryons.
Passé ce laps de temps, la nouvelle loi de Bioéthique de 2004 autorise la possibilité de donner ces embryons à un autre couple, de les détruire ou de les donner à la recherche. Un décret du 6 février 2006 encadre strictement ces différentes éventualités. La loi interdit par ailleurs le recours au clonage comme méthode d’AMP.
Les risques
Au mois de février 2002, la revue médicale internationale « The Lancet » publiait une étude sur les risques neurologiques pour les enfants nés par fécondation in vitro (FIV).
L’utilisation de ces techniques augmenterait par deux le nombre des enfants de faible poids à la naissance et présentant des anomalies congénitales. Le taux de malformations congénitales graves, diagnostiquées avant l’âge d’un an serait de 4,2% chez les bébés de conception naturelle alors qu’il serait de 9% chez les bébés nés après une AMP.
Appel à la responsabilité
Le magazine L’Express en janvier 2003 ouvrait le débat : «Acharnement procréatif : où est l’intérêt de l’enfant ?»
Le Pr Didier Sicard, président du Comité consultatif national d’éthique, et Marie-Hélène Mouneyrat, secrétaire générale y lancent un «cri d’alarme». Ils s’inquiètent de l’aveuglement qui conduit certains parents à un véritable «acharnement procréatif» et certains médecins à mettre en oeuvre des techniques de procréation sous-évaluées. Pour eux il est urgent de se demander s’il faut continuer à satisfaire tous les désirs de parentalité alors même que les techniques employées font courir des risques à l’enfant.
Le 22 janvier 2003, dans une interview au journal Le Monde, le ministre de la santé de l’époque, Jean-François Mattéi, dénonce la dérive de l’assistance médicale à la procréation : « II faut retrouver la raison et le bon sens » estime-t-il. Il déplore que ces techniques soient utilisées alors qu’on est loin d’en maîtriser les conséquences pour l’enfant à naître : « personne ne pense à être l’avocat de l’enfant ». Le ministre estime que les petits « vont paver pour une bonne part les exigences de leurs parents et la complicité des médecins ».
Des enjeux éthiques considérables
Le perfectionnement des techniques d’AMP pose la difficile question du risque de glissement vers un eugénisme latent :
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Une banque américaine de sperme, Repromod, a mis en ligne son catalogue de donneurs proposant plus de 200 fiches. Chacune comprend le pedigree physique et psychologique du donneur des spermatozoïdes et son portrait-robot. Le « visiteur » est invité à choisir les gamètes en fonction de ses critères pour son futur enfant (L’Evénement, 02/09/99). Ce n’est là qu’un exemple : on a aussi beaucoup parlé des ovules de mannequin en vente sur Internet…
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Des couples revendiquent le droit de choisir le sexe de leur enfant : en 2000 un couple écossais a menacé de porter son affaire devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme en cas de refus des tribunaux britanniques de les laisser choisir le sexe de leur futur enfant grâce à la FIV Ces parents avaient déjà 3 garçons et, leur petite fille étant morte 3 ans plus tôt, ils souhaitaient que leur famille retrouve « une dimension féminine ».
Il nous faut donc mettre nos consciences en éveil pour ne pas laisser entrer cette pensée eugénique. Demandons que l’embryon soit protégé en tant que personne humaine (ce qui n’est pas encore le cas aujourd’hui) sinon c’est la porte ouverte à l’euthanasie (Ps 139.13-16).
Malgré tout l’AMP reste une solution envisageable pour un couple souffrant de stérilité dans la mesure ou ovule et spermatozoïdes proviennent des deux membres du couple sans intervention de tiers extérieur au couple.
Considérons quelques exemples bibliques sur les questions de stérilité du couple
1) Tout d’abord, les AMP avec mère de substitution : le couple Abram – Saraï (Gn 15 et 16}
La souffrance de l’attente de l’enfant fut trop forte.
Dans ce cas, pour pallier son problème de stérilité par ses propres moyens, le couple a recours à une solution qui pourrait évoquer une « forme » de mère porteuse. Les conséquences en sont :
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le mépris de la femme légitime (Gn 16.4),
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la fuite de cette mère avec l’enfant,
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le rejet de la mère de substitution et de son fils par le couple (Gn 21.10).
Mais Dieu est bon et bénit Agar et Ismaël (v. 13) et suscite au couple stérile la descendance promise, Isaac. Par contre, les conflits nés entre tes descendants d’Agar et de Saraï se poursuivent encore de nos jours…
2) Ensuite les « PAE » (Procréations Assistées par l’Eternel)
D’autres couples : Rébecca et Isaac (Gn 25.21) ; Manoach et sa femme (Jg 13.3-24) ; Anne et Elqana (1 S 1) ; Elisabeth et Zacharie (Lc 1.7) ont crié leur détresse à Dieu pour résoudre leur problème de stérilité et lui ont fait confiance quelle que puisse être sa réponse.
Dieu a béni en son temps ces couples en leur donnant des enfants, mais sa réponse peut être autre. Il faut aussi l’accepter sachant que Dieu veut le meilleur pour chacun de nous.
À Paul qui implorait Dieu pour la guérison d’une maladie douloureuse lui donnant un aspect repoussant (Ga 4.14), Dieu répondit : « Ma grâce te suffit » (2 Co 12.8-9). Dieu est entièrement souverain et c’est une remise en cause dans tous les domaines que Dieu nous demande. Parfois sa volonté signifie pour nous renoncement et souffrance. Mais avec l’épreuve, II accorde aussi la consolation.
Dieu nous a créés à son image, libres et responsables et II nous demande d’user de notre intelligence et de notre bon sens pour prendre nos responsabilités à la lumière de Sa Parole et guidés par Son Saint-Esprit. Il nous veut spirituellement adulte pour regarder et juger de ces questions avec la vision et la pensée de Jésus-Christ.
A. & F.L.
Bref historique de l’AMP
1978 : Naissance de Louise Brown en Australie après fécondation in vitro (FIV).
1981 : Naissance d’Amandine en France (Pr. Testant et Pr. Frydman).
1982 : Naissances de 2 jumeaux-éprouvette à 16 mois d’intervalle. Ce 2ème jumeau est aussi le 1er enfant né à partir d’embryon congelé.
1985 : Les mères porteuses font leur apparition.
1985-86 : Début du commerce des embryons. La société impliquée est cotée en bourse.
1985 : 1ère fécondation post-mortem avec insémination du sperme congelé du mari décédé.
1986 : Pat Antony porte les enfants de sa fille et de son gendre. Apparition des problèmes de généalogie.
1993 : Clonage de cellules d’embryons humains.
Juin 2001 : Une femme romaine de 62 ans, ménopausée, donne le jour à un enfant.
27 décembre 2002 : Prétendue naissance d’un bébé conçu par clonage par les raéliens.
2004 : Interdiction du clonage humain (loi 2004-800).