Sois en Dieu et fais ce que tu veux
Par Daniel Mattioli
« Cela fait 6 mois que je fréquente une jeune fille chrétienne, Émilie, en tout honneur, m’explique Martin, 23 ans, pendant un camp. Je l’aime, mais je ne sais pas si c’est elle que Dieu veut pour moi. Je me triture l’esprit pour savoir si cette union est la volonté de Dieu. Comment le savoir ? » Je lui donne ma réponse. Quatre jours plus tard, Martin sait quelle est la volonté de Dieu quant à cette fréquentation. Il m’annonce alors qu’il a rompu, son visage est aussi rayonnant que celui de Moïse descendant de la montagne »
« Dans le même camp, Michaël, 15 ans, est en train de tomber amoureux de Blandine. Cela fait 36 heures qu’il a la fièvre. Sa vie n’a pas de raison d’être si Blandine ne devient pas sa femme. Il me parle avec les larmes aux yeux, ses lèvres tremblent tellement d’émotion qu’il doit s’y prendre à deux fois pour me faire comprendre sa situation. Et la question est la même : « Est-ce la volonté de Dieu que je dise à Blandine tout l’amour que j’ai pour elle ? » Je lui réponds. Il prend un air pensif, puis me regarde fixement. Il est devenu serein, il me dit : « Maintenant je sais ce que je dois faire, je ne vais rien dire du tout à Blandine »
« Philippe, en terminale, ne voit pas du tout ce que Dieu veut pour sa vie après le bac. Il est dans le brouillard et cela lui pèse. Ce qui est décourageant et qui assombrit son visage, c’est qu’il demande avec insistance à Dieu de lui indiquer sa volonté, mais elle ne se manifeste pas. « Alors, suis-je son enfant ? Parce que si je l’étais réellement, Dieu ne pourrait pas ne pas me répondre. » Son père était pasteur. Sa faiblesse était de frapper sa femme et, de plus, devant les enfants. Philippe a grandi avec cette idée : croire en Dieu et faire du mal, c’est de l’ordre du normal. « Si Dieu ne répond pas à mes demandes, c’est qu’il me frappe comme mon père frappait ma mère. Cela doit être pour notre bien. Daniel, me dit-il, as-tu une idée de ce que Dieu veut pour moi après ? » Je lui donne ma réponse. Le visage de Philippe exprime l’étonnement, je sens que son esprit est ballotté. D’une traite, il m’explique dans le détail ce qu’il va entreprendre après le bac »
Un jour, Aristote est invité à la table d’Alexandre le Grand, encore jeune à ce moment-là. Alors qu’ils mangent, un petit chien vient jouer et lécher la main d’Alexandre. Aristote, amusé par les prouesses du petit chien, interpelle Alexandre : « Manifestement ce chien t’aime beaucoup ». Alexandre répond : « En faisant la supposition que ce chien m’aime, tu lui prêtes des sentiments ; et si tu estimes que ce chien entretient des sentiments, tu suggères alors qu’il a une âme. » Imperturbable, Aristote répond à son interlocuteur : « Ça, c’est une question qui te dépasse… Et elle me dépasse également. » Il conduit le jeune Alexandre dans son laboratoire de biologie, se fait apporter une truie en ordonnant de l’égorger et de lui ouvrir le ventre de toute sa longueur. Il pousse Alexandre à plonger sa main dans les entrailles de l’animal, de fouiller et de chercher. Alexandre est excité par l’expérience, il ne sait pas ce qu’il cherche, mais son maître lui dit de chercher. « Plonge ton bras » lui dit le philosophe. Le jeune homme s’exécute. « Cherche encore et encore : trouves-tu son âme ? » Déçu, Alexandre doit répondre par la négative. « Ça, c’est une question qui te dépasse, lui avait dit son professeur, et elle me dépasse aussi. »
Il semblait que la volonté de Dieu, pour mes trois amis campeurs, était une question aussi complexe que celle posée par Alexandre. La volonté de Dieu était, pour eux, aussi camouflée que l’était l’âme de cette truie et aussi obscure que l’était la question de l’âme pour Aristote à ce moment-là. Pour eux, Dieu avait parsemé sa volonté sur leur chemin comme des parents cachent des oeufs de Pâques en demandant à leurs enfants de les rechercher. Et ne pourraient en bénéficier que ceux qui les trouveraient. Mais si on fait abstraction de l’aspect ludique et sympathique de la chasse aux oeufs, on a affaire à une sorte de sarcasme, Dieu nous laissant tâtonner et haussant les épaules à chaque fois qu’on passe à côté d’un oeuf sans le voir. Dieu rend-il vraiment sa volonté si peu claire ?
Une de mes paroissiennes se levait le dimanche matin et demandait à Dieu, debout devant son dressing, quels vêtements elle devait mettre ce jour-là. Quand Dieu ne répondait pas, elle en déduisait que la volonté de Dieu pour elle ce matin-là était de ne pas aller au culte. Ainsi, d’un côté, on la cherche, mais on ne la trouve pas, d’un autre, elle est simple et on agit simplement. Dans les deux cas, on a affaire à une volonté de Dieu « cachée ».
La Bible présente au contraire un Dieu qui aime et qui fait savoir avec précision quelle est sa volonté. Nous avons affaire à un Père céleste pour qui toutes nos voies ont de l’importance. « Ne soyez pas sans intelligence, mais comprenez quelle est la volonté du Seigneur » (Ep 5.17). Sommes-nous sans intelligence si nous ne comprenons pas la volonté du Seigneur ? Non. Ce n’est pas l’intelligence qui manque à celui qui ne comprend pas la volonté de Dieu, mais la plénitude de l’Esprit (Ep 5.18).
Être rempli du Saint-Esprit ? C’est vivre le quotidien en gestes et en paroles comme si Jésus était présent. Dire quelque chose à quelqu’un – ou sur quelqu’un – doit se faire comme si Jésus- Christ, le Fils de Dieu, le créateur des cieux et de la terre, était physiquement présent. Sans cela, si l’on parle quand même, on n’est pas rempli de l’Esprit. En tant que chrétien, on a certes l’Esprit, mais celui-ci est éteint ou attristé. On ne sait pas quelle est sa volonté.
Comment continue la liste que Paul adresse aux Éphésiens ? La plénitude de l’Esprit, c’est la communion fraternelle par le chant et la louange, dans une totale soumission interpersonnelle1 (les épouses soumises à leur époux2 ; un amour sans borne des maris à l’égard de leur femme3 ; l’obéissance des enfants à leurs parents4 ; pour les parents, ne pas irriter leurs enfants5 ; pour les ouvriers, l’obéissance à leur employeur6 ; pour les employeurs, traiter leurs ouvriers avec justice7). Enfin, être rempli de l’Esprit, c’est être saturé de la Parole et de sa mise en pratique.
Quelle était ma réponse à ces trois jeunes gens en recherche de la volonté de Dieu ? Sois rempli de l’Esprit Saint et fais ce que tu veux ! Jean 15 laisse à penser que, pour ceux qui y restent attachés, les pensées du cep deviennent celles des sarments. La sève qui passe dans le cep passe également en eux. Plus de différence donc entre son vouloir et le nôtre. Mais, cela n’arrive qu’à celui qui demeure en lui. « Quiconque boit de cette eau n’aura jamais soif » (Jn 4.13). Pour ce qui regarde la droite compréhension de la volonté de Dieu, il ne s’agit pas d’un besoin ponctuel, mais continuel.
Méditons le Psaume 37, versets 4 et 5. La volonté de Dieu ne se recherche pas, elle se vit : sois en Dieu et fais ce que tu veux. Laissons Dieu nous remplir… sa volonté devient limpide.
D.M.
NOTES
1. Ep 5.19-21
2. Ep 5.22-24
3. Ep 5.25-33
4. Ep 6.1-3
5. Ep 6.4
6. Ep 6.5-8
7. Ep 6.9